TEST – La série Legacy of Kain est l’un des piliers iconiques des jeux de la fin des années 90 et du début des années 2000. Avec le remaster HD signé Aspyr, Legacy of Kain : Soul Reaver 1 & 2 Remastered fait renaître Raziel, cet anti-héros vampirique devenu spectre. Sa mission ? Tuer ses frères, défier son père tyrannique et échapper aux profondeurs infernales. Son atmosphère sombre, gothique et son style « edgy » propre à l’ère du millénaire captivent encore aujourd’hui. Mais même cette remasterisation n’a pas su résoudre les problèmes d’un rythme lent et de niveaux au design parfois dépassé. Par moments, jouer à Soul Reaver donne vraiment l’impression de se perdre dans les abysses de l’enfer avec Raziel. Et pourtant, c’est justement cette unicité qui rend ces jeux mémorables et toujours aussi plaisants, même des années plus tard.

Les remasters Soul Reaver 1 & 2 signés Aspyr témoignent d’un grand respect et d’une excellente qualité, confirmant le savoir-faire du studio. Bien qu’encore relativement jeune dans le domaine des remakes, Aspyr a déjà prouvé son talent avec, par exemple, Tomb Raider I-III Remastered plus tôt cette année. En dehors d’une amélioration spectaculaire des graphismes, la plupart des éléments et du charme originel de Soul Reaver sont restés intacts, préservant ainsi toute l’ambiance gothique adorée par les fans.

Une magie gothique qui traverse les âges

Dès le lancement des jeux, on comprend immédiatement pourquoi la duologie Soul Reaver est devenue une légende. Les cinématiques 3D précalculées, parfois un peu maladroites mais si charmantes, donnent instantanément le ton. Qu’il s’agisse de voir Raziel banni dans l’au-delà ou de poursuivre l’histoire laissée en suspens dans le premier jeu, l’atmosphère gothique vous enveloppe dès le début.

Cette ambiance imprègne chaque instant des deux jeux. Imaginez les longs couloirs de temples dans les premières heures de Soul Reaver 2, où vous combattez monstres, vampires et fanatiques religieux armés d’arbalètes. Ces décors dégagent une noirceur mélancolique qu’on ne voit plus beaucoup aujourd’hui. Pour les joueurs nostalgiques : vous souvenez-vous de ces vidéos Devil May Cry montées sur des chansons de Papa Roach dans les années 2000 ? Eh bien, c’est exactement ce genre de prestige gothique et de mélancolie que ces jeux capturent si bien.

À l’époque, Soul Reaver était déjà visuellement impressionnant, mais ce remaster fait véritablement briller ses forces. Raziel est désormais bien plus détaillé et moins « pixélisé », affichant tout son côté sombre et tragique dans un rendu visuel impeccable. Les tapisseries des donjons sont d’une netteté fascinante, tandis que les fissures sur les murs et les détails des briques ajoutent une richesse atmosphérique. Le plus grand bond en avant réside sans doute dans la clarté des énigmes : lorsque vous insérez correctement un objet dans une énigme, des changements subtils dans les textures et la luminosité confirment immédiatement votre réussite.

Pour ceux qui préfèrent l’apparence classique, le remaster propose une option nostalgique parfaite : d’une simple pression sur un bouton, vous pouvez basculer entre les graphismes originaux et les nouvelles améliorations. Ce choix séduira les puristes tout en permettant aux nouveaux venus de découvrir pourquoi cette duologie est si spéciale.

Une révolution technologique entravée par ses limites

Lorsque la duologie Soul Reaver est sortie, elle était en avance sur son temps à bien des égards. Malgré les limitations techniques des consoles de l’époque, comme la PlayStation ou la PS2, les jeux proposaient des concepts qui restent novateurs encore aujourd’hui. La capacité de basculer entre le monde matériel et le monde spectral a marqué une avancée majeure dans le gameplay. Les portails éthérés, les écrans de chargement masqués et les puzzles nécessitant d’explorer deux versions parallèles des mêmes environnements – l’un plus déformé et surnaturel que l’autre – étaient révolutionnaires. Ces idées ont clairement influencé des titres comme Portal ou, plus récemment, The Medium.

Il était essentiel pour Soul Reaver de prendre de tels risques pour marquer les esprits. Développé par Crystal Dynamics pour PlayStation, ce titre visait à rivaliser avec The Legend of Zelda de Nintendo, mais dans une version plus sombre et mature. L’histoire nous a montré que Nintendo est resté imbattable, et la série Legacy of Kain n’a jamais atteint une popularité mainstream. Pourtant, Soul Reaver 1 & 2 ont conservé leur statut culte et demeurent un morceau essentiel de l’histoire vidéoludique.

En rejouant aujourd’hui, le charme est toujours présent. Les défauts d’origine, comme les environnements répétitifs et les énigmes fastidieuses, n’ont pas disparu, mais ils n’entament en rien l’audace et la créativité qui imprègnent ces jeux.

Des lances et des âmes au bord de l’au-delà

Le système de combat de Soul Reaver reste pratiquement inchangé, à l’exception d’un schéma de commandes plus fluide et intuitif. Vous incarnez toujours Raziel, ce spectre gremlin-esque, utilisant lances, torches et autres armes improvisées pour vaincre vampires et monstres. Pour sceller définitivement leur sort, le jeu propose l’un des mécanismes les plus mémorables de l’histoire vidéoludique : Raziel retire son masque pour dévorer leurs âmes. Ce moment est aussi brutal que satisfaisant, même aujourd’hui.

Certains ennemis ne peuvent être affrontés que dans le monde spectral, ce qui ajoute une couche de complexité au combat. Les armes récupérées peuvent également être transportées d’un environnement à l’autre, permettant la création d’une épée spirituelle imprégnée de sang et de pouvoir surnaturel. Bien que le système de combat ne rivalise pas avec les meilleurs du genre, il offre une expérience immersive qui reste captivante.

Cela dit, les jeux Soul Reaver héritent aussi de certaines idées datées et frustrantes. Il est souvent difficile de savoir quoi faire ou où aller. Le manque de guidage peut devenir exaspérant, surtout dans le premier jeu, où les puzzles bloquent parfois complètement la progression. Les longues sections de puzzles répétitifs, comme les énigmes de blocs glissants, ralentissent le rythme sans véritable récompense.

Heureusement, Soul Reaver 2 a corrigé plusieurs de ces problèmes. Les puzzles sont plus équilibrés, et la conception des niveaux est plus fluide et logique, bien que l’histoire laisse encore le joueur un peu dans le flou. Si vous découvrez ces jeux pour la première fois, avoir un guide ou une solution à portée de main peut grandement améliorer votre expérience.

Deux classiques intemporels à ne pas oublier

Malgré ses défauts, ce remaster signé Aspyr réussit à préserver l’essence de Soul Reaver. Au lieu de lisser toutes les aspérités, le studio a choisi de se concentrer sur des améliorations essentielles. Il n’a pas sacrifié l’identité originale sur l’autel de la modernité, et c’est exactement ce qu’on attend d’un remaster de ce calibre.

Les ajouts comme les niveaux restaurés et le système jour/nuit initialement supprimé enrichissent encore davantage ces jeux déjà novateurs. C’est ce genre d’initiatives audacieuses et étranges qui ont marqué l’industrie à l’époque. Il ne faut pas oublier que Soul Reaver fut aussi la première réalisation d’Amy Hennig, qui allait ensuite créer la série Uncharted. Si un jeu mérite d’être protégé de l’oubli, c’est bien celui-ci.

-Gergely Herpai “BadSector”-

Éditeur : Aspyr
Développeur : Crystal Dynamics
Style : Action-aventure
Sortie : 10 décembre 2024