CRITIQUE DE SÉRIE – La quatrième saison de Netflix reprend l’histoire là où le monde reste fissuré, et où les cœurs se ressoudent plus lentement que les jointures d’une armure cabossée. Liam Hemsworth reprend l’épée et le grondement contenu, tandis que les trajectoires de Ciri et Yennefer se recroisent – avec davantage de sang, de trahisons et de plaies qui refusent de se refermer. La question n’est pas de savoir si de nouveaux monstres surgissent ; c’est de savoir si la série peut retrouver le pouls perdu avec le départ d’Henry Cavill.
L’épisode d’ouverture trace ses lignes de front en quelques minutes : la zone grise morale est plus épaisse que jamais, et les choix claquent comme une lame d’argent dégainée une seconde trop tôt. Un narrateur déterre d’anciennes histoires tandis que la légende arbore un nouveau visage – ce n’est pas le mythe qui se réécrit, ce sont les attentes du public qui bougent. L’enjeu demeure : préserver cette « famille » fragile qui rend encore ce monde habitable.
« Toujours perdue, jamais retrouvée » — Une famille dans la tempête, une lignée dans le viseur
Au centre, la famille de fortune tient toujours. Geralt et Yennefer ne sont pas seulement liés par la magie et le désir, mais par l’espoir têtu que Ciri cessera de fuir et atteindra enfin un havre. De son côté, Ciri abandonne son nom et, sous l’alias « Falka », dérive vers les Rats — une bande d’anti-héros cabossés où grandir n’est pas une initiation, mais une série d’ecchymoses. « Toujours perdue, jamais retrouvée », dit-elle ; moins une plainte qu’une mise à l’épreuve de son identité.
Geralt recrute à sa manière : pas des champions impeccables, mais des survivants aguerris qui ne cherchent pas à écrire un conte — ils veulent ramener quelqu’un à la maison, quelqu’un chez qui des prophéties battent dans les veines. Yennefer, elle, se dresse face à Vilgefortz, dont la froide logique masque un appétit insatiable de pouvoir ; le Sang Ancien de Ciri n’est pas un trophée, c’est une clé, et elle pourrait ouvrir bien trop de serrures.
Cases à cocher et nouveaux favoris — Quand la quête annexe maintient le fil principal en vie
La série reste un écheveau de quêtes et de quêtes annexes : parfois une carte, parfois une impasse. Avec les livres et les jeux vidéo dans son ADN, une petite armée de pièces se déplace sur l’échiquier — la mosaïque dérape par moments, mais l’élan finit par se former. Les chouchous des fans entrent enfin véritablement en scène, tandis que l’escapade de Ciri chez les Rats donne au passage à l’âge adulte une rugosité bienvenue : pertes, doutes, petites victoires arrachées de justesse.
Inévitablement, les fils convergent vers une confrontation avec Vilgefortz, tandis que la réunion de la « famille » ressemble moins à une promesse qu’à une dette à solder — envers eux-mêmes et les uns envers les autres. Le tempo n’est pas toujours serré, mais la direction est claire ; quand les engrenages s’emboîtent, le world-building rappelle pourquoi tant de spectateurs sont restés depuis la première saison.
Liam Hemsworth en Geralt — Nouveau visage, autres accents
Impossible d’y couper : le sujet de l’année, c’est le nouveau visage de Geralt. Hemsworth a l’allure d’un premier rôle classique, mais son regard est plus doux ; le poids du muscle et des vieilles cicatrices pèse moins sur lui. Sa voix est plus haute, le grognement plus retenu ; là où Cavill pouvait évoquer un monde entier d’un seul grondement rocailleux, Hemsworth compose des nuances par de petits gestes. Une passation courageuse et respectable — et pourtant, beaucoup regretteront ce centre de gravité qui tenait jadis les scènes.
C’est aussi là que les points faibles de la production se dévoilent : une image qui tire parfois vers le stérile, des costumes et des maquillages qui paraissent trop neufs pour la route qu’ils ont faite, et un étalonnage qui ponce parfois le sang et la boue qui devraient coller. « La vie, c’est la crasse, le sang et la mort », lâche Ciri — mais l’écran ne le fait pas toujours sentir.
Mise en place du final ou résurrection tardive ?
C’est acté : la cinquième saison fermera le livre. Ce chapitre ressemble à l’antichambre de cette fin — trop souvent une liste de cases à cocher plutôt qu’un récit qui s’impose. Les duels à l’épée et le bestiaire continuent d’apporter leur lot de plaisir, mais la série doit retrouver la charge brute qui la faisait cogner. Si elle se resserre pour l’ultime volet, elle peut gagner son bras de fer intérieur ; sinon, cet opus restera une étape compétente mais fatiguée vers un endgame inévitable.
-Gergely Herpai BadSector-
Le Sorceleur S04
Direction - 5.6
Acteurs - 6.2
Histoire - 5.1
Visuels/Musique/Sons/Action - 5.2
Ambience - 5.1
5.4
MÉDIOCRE
Le plus grand pari de cette quatrième saison est le nouveau Geralt : Hemsworth fait le job, mais il n’égale pas la prestance de Cavill. L’arc Ciri/Rats apporte la vraie charge émotionnelle, tandis que l’univers paraît souvent trop stérile au regard de la brutalité qu’il affiche. À l’approche du final, c’est un volet correct mais inégal, et un rappel que la conclusion devra faire ses preuves.







