CRITIQUE DE SÉRIE – La saison 2 de Pax Massilia creuse encore davantage ce Marseille cabossé, violent et moralement piégé, où les solutions propres n’existent pas. La série ne se contente pas de décortiquer la mécanique du crime; elle montre aussi, avec une précision sans pitié, comment le maintien de l’ordre peut user ceux qui le portent. Les enjeux montent, la violence se fait plus sèche, et les conséquences paraissent définitives.
Quand on pense à la France, beaucoup voient d’abord Paris et la tour Eiffel; Pax Massilia prend le contre-pied. La série nous entraîne dans l’envers criminel de Marseille, là où la frontière entre la pègre et la police s’est depuis longtemps dissoute. Ici, les rues ne sont pas un décor, mais une zone de friction permanente, où chaque décision a un prix, et où quelqu’un finit toujours par payer.
En donnant à voir à la fois les rouages des réseaux criminels et la pression qui fissure l’institution policière, la série dépasse le simple thriller d’action. Elle fonctionne aussi comme un constat social à vif. L’ambiance peut rappeler les grands polars réalistes à la Sur écoute, avec une différence nette: tout se joue sous la lumière de la Riviera, dans un cadre ensoleillé, mais impitoyable.
La zone grise de la loi
Le cœur de l’intrigue reste le même: démanteler le réseau de drogue marseillais. L’enquête est menée par le capitaine Lyès Benamar, qui, au fil des années, a franchi de plus en plus de lignes. Ses méthodes ne sont plus seulement atypiques, elles deviennent franchement dangereuses: des civils sont blessés, des suspects finissent à l’hôpital, et la confiance dans la justice se délite autour de lui.
C’est dans ce climat tendu qu’arrive Alice Vidal, capitaine transférée d’Interpol, au dossier impeccable et à la boussole morale plus stricte. Elle apporte une autre manière de faire, mais surtout un contrepoids aux décisions de plus en plus radicales de Lyès. Leur dynamique donne le tempo de la saison: même objectif, moyens radicalement opposés.
La cible demeure Franck Murillo, baron de la drogue aussi brutal qu’insaisissable, qui semble envelopper la ville d’un filet invisible et garder systématiquement une longueur d’avance. Murillo n’est pas un antagoniste parmi d’autres; il agit comme une pression constante qui met à l’épreuve les limites et les principes de ceux qui le traquent.
Des personnages solides, des conséquences brutales
L’un des grands atouts de la série, c’est sa narration centrée sur les personnages. Les seconds rôles ne servent pas de décor: chacun a ses motivations, son passé, et une mise personnelle dans la partie. Cela vaut particulièrement pour Lyès et Alice, dont les décisions pèsent autant sur l’enquête que sur leur propre trajectoire.
La réalisation mise sur un réalisme frontal, et les scènes d’action restent sèches et imprévisibles. Pas de parenthèses héroïques ni de catharsis spectaculaire, seulement une violence rapide, chaotique, qui emporte souvent des innocents. La série rappelle sans cesse que cette guerre n’a rien d’un jeu: elle s’écrit en pertes.
Un deuxième chapitre plus sombre
La saison 2 bascule clairement vers une noirceur accrue. Les événements de fin de saison 1 redistribuent les cartes, et une nouvelle organisation criminelle surgit pour exploiter le vide laissé derrière. La police n’est plus seulement sous pression de l’extérieur; elle se fragilise aussi de l’intérieur.
Pour Lyès, la situation impose une rupture. Il doit revoir ses méthodes et s’enfoncer plus profondément dans l’underworld marseillais. Cela passe notamment par un retour vers Ali Saïdi, ami d’enfance devenu figure importante du milieu. Le choc entre passé intime et intérêts du présent devient l’un des moteurs dramaturgiques les plus puissants de la saison.
Aucune échappatoire
La fin de saison ne cherche pas à rassurer. Le récit ne s’intéresse pas à la façon de gagner, mais à ce qu’il reste d’un individu quand chaque choix exige un compromis de plus. La situation de Lyès le dit clairement: entrer dans l’univers criminel n’est pas une tactique provisoire, c’est un état durable, dont on ne sort pas sans casse.
C’est là que Pax Massilia devient réellement implacable et honnête. Les déplacements de pouvoir, l’ascension de nouveaux clans et la désagrégation interne de la police ne conduisent pas vers un final propre; ils pointent vers une érosion lente, continue. La saison 2 ne ferme pas l’histoire, elle fige un constat: dans cette ville, la loi et le crime ne se font plus face, ils appartiennent au même système, sur deux versants.
-Herpai Gergely « BadSector »-
Pax Massilia, saison 2
Direction - 8.2
Acteurs - 8.2
Histoire - 7.6
Visuels/Musique/Sons/Action - 8.5
Ambiance - 8.2
8.1
EXCELLENT
La saison 2 de Pax Massilia durcit le trait: plus de violence, une morale encore plus instable, et des personnages qui glissent sans filet. Les décisions mordent, la machine se dérègle, et Marseille avale tout. Un polar tendu, âpre, qui ne cherche pas le confort.






