Selon les experts du secteur, l’acquisition de 55 milliards de dollars « n’a aucun sens » et entraînera inévitablement des licenciements et la fermeture de plusieurs studios. Joost Van Dreunen et Serkan Toto analysent les conséquences potentielles de l’opération.
La deuxième plus grande acquisition de l’histoire du jeu vidéo — d’une valeur colossale de 55 milliards de dollars — place Electronic Arts et le Fonds d’investissement public saoudien au cœur d’un débat houleux. Bien que l’opération doive encore être approuvée par les autorités compétentes, l’avenir d’EA suscite déjà de vives inquiétudes. Après une avalanche d’annonces, les analystes financiers et vidéoludiques sont unanimes : des licenciements massifs et la fermeture de studios semblent inévitables.
Joost Van Dreunen, professeur à la Stern School of Business, a déclaré à GamesRadar que l’entreprise consolidera probablement les studios les moins performants tout en renforçant ses franchises sportives — qui représentent actuellement environ 70 % de ses revenus — grâce à des équipes plus importantes et des investissements accrus. En revanche, les équipes développant des projets moins rentables pourraient être fermées ou cédées. Van Dreunen cite notamment BioWare, dont le récent Dragon Age: The Veilguard n’a pas répondu aux attentes en matière de ventes et de critiques.
Serkan Toto de Kantan Games partage cette analyse et estime qu’EA se concentrera sur les licences à fort rendement au détriment de projets plus originaux et risqués. David Cole de DFC Intelligence ajoute qu’EA pourrait vendre ses « studios secondaires ou ses propriétés intellectuelles mineures » plutôt que de les fermer purement et simplement.
Un prix d’achat trop élevé – et une dette colossale
La dette d’environ 20 milliards de dollars liée à cette acquisition renforce les craintes de licenciements et de ventes d’actifs. Selon Toto, les acquisitions de cette ampleur s’accompagnent généralement de « restructurations radicales, de licenciements et de changements stratégiques », et il n’y a aucune raison de penser que le cas d’EA sera différent. L’entreprise a toutefois tenté de rassurer ses employés en affirmant qu’aucun changement immédiat n’était prévu au niveau des équipes ou des postes.
Certains analystes remettent également en question la logique de l’opération. Van Dreunen estime que le prix de 55 milliards de dollars « n’a aucun sens » et surévalue EA compte tenu de son flux de trésorerie annuel et de la croissance limitée de ses activités principales, comme les jeux sportifs et les titres live service. Cependant, la privatisation d’EA pourrait lui permettre d’investir plus librement dans des franchises majeures telles que Battlefield, EA Sports ou Apex Legends, sans la pression constante des actionnaires.
La participation du Fonds d’investissement public saoudien est considérée par beaucoup comme un élément positif. Elle pourrait entraîner une injection massive de capitaux dans les années à venir et même « alléger l’exigence d’une rentabilité immédiate ». Bien que certaines suppressions de postes soient inévitables, la plupart des licences d’EA devraient survivre. La question est désormais de savoir si ces changements stimuleront la créativité et l’émergence de nouveaux jeux, ou s’ils renforceront une approche plus conservatrice axée sur des franchises sûres et établies.
Source : 3djuegos