Le mode de déplacement du Magellan semble brillant dans Death Stranding 2, mais il est bien moins original que ce que vous – ou Hideo Kojima – pourriez penser. Kojima présente le DHV Magellan comme un vaisseau révolutionnaire, mais l’idée puise dans des sources classiques de science-fiction et de véritables théories de l’espace-temps.
Hideo Kojima fait partie de ces créateurs qui façonnent leurs projets en puisant dans un océan d’idées et de concepts extérieurs. Son génie ne réside pas nécessairement dans l’invention de zéro, mais dans sa capacité à les s’approprier, les transformer et leur donner une identité unique. Dans Death Stranding 2, l’exemple parfait est le DHV Magellan, le vaisseau piloté par Tarman qui sert de base mobile et de moyen de voyage rapide à Sam Porter Bridges. Ce qui est remarquable avec le Magellan, ce n’est pas seulement son esthétique ou ses fonctionnalités, mais sa manière de se déplacer : il utilise le TAR pour accéder à un plan de réalité entre les réalités, connecté au Chiral Network. Et non, malgré ce que l’on pourrait penser, ce concept n’est ni totalement nouveau ni complètement fou — il s’inspire d’une longue tradition de la science-fiction.
DHV Magellan : base mobile et transport chirale
Le DHV Magellan agit comme un vaisseau, une base opérationnelle mobile, un entrepôt et un système de voyage rapide. Relié au Chiral Network, il peut se déplacer entre des installations synchronisées, transporter des ressources et du matériel, et servir de soutien logistique aux missions de Sam. Piloté par Tarman (inspiré de George Miller, créateur de Mad Max), et assisté par une IA, le vaisseau permet à l’équipage de rester à l’écart tandis que Sam transporte cargaisons et métaux comme une bête de somme.
Du point de vue du gameplay, le Magellan simplifie les déplacements entre nœuds et permet la gestion de l’inventaire depuis n’importe quel point connecté. Mais parce que Kojima aime justifier chaque élément dans son univers, ce système est expliqué par la manipulation de matière chirale et la connexion aux Beaches — une justification science-fictionnelle liant technologie et ontologie. De grands mots pour un concept qui, en réalité, n’est pas de lui.
Pas si original qu’il n’y paraît
Bien que le Magellan soit impressionnant dans l’univers de Death Stranding, l’idée de voyager à travers une dimension alternative, une « pliure » de l’espace-temps ou un « espace entre les espaces » n’est pas nouvelle. La science-fiction explore ces mécanismes depuis longtemps : portails, hyperspace ou routes dimensionnelles permettant des déplacements quasi instantanés sur de vastes distances.
Dans les comics The Authority, par exemple, le vaisseau Transport traverse le Bleeding, un médium extradimensionnel reliant des points éloignés pour des interventions instantanées. De même, l’hyperespace de Star Wars permet des voyages stellaires en quelques secondes, parfois même présenté comme une manifestation physique de la Force. D’autres exemples incluent la TARDIS de Doctor Who, les portails de Stargate SG-1, le warp de Star Trek, les Boom Tunnels de Jack Kirby, ou encore le Warp de Warhammer 40,000. Dans Mass Effect, les Mass Relays permettent des sauts interstellaires, tandis que dans Halo, les vaisseaux traversent le Slipspace.
Tous ces exemples partagent un même principe : utiliser une couche de réalité alternative pour franchir les distances — avec ses propres règles et risques — exactement comme le fait le Magellan. Même la science s’en inspire : la métrique d’Alcubierre, proposée par Miguel Alcubierre, décrit un hypothétique moteur warp capable de déformer l’espace-temps pour dépasser la vitesse de la lumière.
Kip Thorne et d’autres ont étudié les trous de ver traversables, bien que leur stabilité dépende d’énergies exotiques encore hors de notre portée. L’NASA, avec son programme Eagleworks, explore également ces idées. La théorie des cordes et les univers parallèles ajoutent d’autres spéculations, suggérant des raccourcis cosmiques ou des ponts entre réalités. Bien que purement théoriques, elles partagent toutes le même objectif : repousser les limites de l’espace et du temps.
Pourquoi le Magellan est unique
Le Magellan n’est pas seulement un moyen de transport dans Death Stranding 2 : c’est un centre logistique qui fusionne gameplay et narration. Sa présence renforce la philosophie centrale de la série — connecter des territoires, unir les gens et donner du sens à chaque cargaison. Sa base chirale fusionne technologie et ontologie, façonnant la façon dont Sam Porter interagit avec un monde fragmenté.
Le génie de cette idée ne réside pas dans l’invention d’un concept inédit — voyager à travers des dimensions alternatives est un classique de la science-fiction — mais dans la manière dont Hideo Kojima le réinvente et l’intègre dans son univers. Le Magellan transforme une idée familière en un outil narratif et ludique puissant, qui semble pourtant neuf dans le contexte du jeu.
Source : 3djuegos