Cronos: The New Dawn – L’horreur polonaise à l’ombre de la Guerre froide

TEST – Avec Cronos: The New Dawn, Bloober Team ne signe pas seulement un jeu d’horreur glaçant, mais une plongée suffocante dans la Pologne des années 80, marquée par la Guerre froide, le Rideau de fer et un socialisme qui imprégnait chaque aspect du quotidien. Testé sur PlayStation 5, le studio démontre enfin sa capacité à livrer une narration mûre, une atmosphère raffinée et un gameplay qui rend hommage aux classiques du survival horror tout en y apportant sa propre identité. Les mécaniques ne sont pas exemptes de compromis, mais l’ensemble est plus convaincant et percutant que tout ce que le studio avait proposé auparavant. Cronos prouve que Bloober Team a surmonté ses faiblesses passées et a enfin livré son véritable chef-d’œuvre.

 

Après deux Layers of Fear, The Medium et plus récemment Silent Hill 2, j’entretiens une longue histoire avec les créations de Bloober Team. Leurs intentions ont toujours été louables et leurs concepts souvent intrigants, mais la précision et le tranchant faisaient défaut, empêchant leurs projets de réellement s’élever. Beaucoup partagent cette impression, même si tout le monde ne l’exprime pas avec autant de franchise. Mais avec Cronos: The New Dawn – une œuvre entièrement originale, contrairement au remake de Silent Hill 2 – la donne change radicalement.

 

 

Guerre froide, Voyageurs et Orphelins

 

Cronos: The New Dawn raconte une histoire de science-fiction originale autour des « Voyageurs », réveillés un à un et envoyés dans la ville polonaise de New Dawn en 1981, au cœur de la Guerre froide, quand le Rideau de fer pesait de tout son poids sur la vie quotidienne. Mais ce monde s’est effondré, dystopique et déserté. Quelque chose d’horrible est arrivé : la réalité s’est fracturée et seuls subsistent des monstres que les Voyageurs appellent les « Orphelins ». Des créatures affamées, féroces et dénuées de conscience, qui fusionnent avec des corps humains pour grandir et se transformer en abominations grotesques.

Pourquoi sommes-nous réellement à New Dawn ? Quel lien existe entre cette brèche dans la réalité et le virus qui a engendré les Orphelins ? Quelle est la véritable puissance des Voyageurs ? Voilà le fil narratif qui vous captive de la première image inquiétante jusqu’au générique final. Sans trop en révéler, la mythologie des Voyageurs, des Orphelins et de ce monde brisé est si riche et si marquée qu’elle peut rivaliser avec les poids lourds du genre. Très vite, on développe un lien fort avec ce que le héros appelle « la Vocation », un code d’honneur à la manière mandalorienne, ponctué de formules telles que « telle est notre mission ».

 

 

Survival Horror, Retour Aux Sources

 

Le survival horror – catégorie à laquelle Cronos: The New Dawn appartient sans équivoque – repose presque uniquement sur l’atmosphère, la narration et l’exploration d’un monde qu’il faut cartographier et, surtout, survivre. L’univers déborde de détails distinctifs, révélés à un rythme posé mais constant, sans excès ni maladresse. On y retrouve une sophistication que Bloober n’avait jamais maîtrisée auparavant. Que ce soit les environnements traversés, les commentaires du Voyageur ou la structure narrative plus directe, Cronos devrait être étudié comme un modèle de récit horrifique.

Côté gameplay, la simplicité est assumée, comme chez les grands classiques du genre. Le Voyageur manie une arme unique dotée de plusieurs modes, et l’inventaire s’inspire clairement de Resident Evil, où la gestion de l’espace limité est cruciale. Les ressources accumulées permettent d’améliorer la combinaison, les armes et divers outils, assurant une progression tangible.

Chaque action a du poids : le martèlement des bottes métalliques, la visée d’un fusil façon Terminator braqué sur un Orphelin avant de presser la détente. Chaque son, chaque animation, chaque choix de design renforce ce sentiment d’impact et de lourdeur. Pas de vitesse arcade ici, mais une mécanique ancrée au sol, qui crée un lien fort avec son avatar. Certains parleront de simplicité ; moi, j’y vois une intention claire.

 

 

Monstres Affamés, Munitions Rares

 

En progressant dans ce monde fragmenté, on croise de plus en plus d’Orphelins. Leur diversité n’est pas énorme, mais la tension permanente liée à la gestion des ressources masque cette limite – un peu comme dans Dead Space Remake, où la stratégie du joueur compensait le bestiaire réduit. Cronos vous plonge dans une véritable « famine de munitions », obligeant à survivre d’un affrontement à l’autre. Cette pression découle de la mécanique de « fusion », véritable cœur du système de combat.

Chaque ennemi abattu crée une ouverture : d’autres Orphelins peuvent utiliser les restes pour se renforcer. Laisser traîner des cadavres, c’est s’exposer à des adversaires plus puissants, qui exigent davantage de balles. Il faut donc brûler systématiquement les corps, ce qui consomme encore plus de ressources. L’équilibre est tendu, parfois frustrant, et il m’est arrivé de croire que le jeu m’avait définitivement privé de munitions – mais j’ai toujours fini par m’en sortir. Sans doute est-ce là l’objectif.

 

 

Performance Technique sur PlayStation 5

 

J’ai testé Cronos sur PlayStation 5, qui propose deux modes graphiques (qualité et performance). En mode performance, le jeu tourne globalement à 60 fps, mais Bloober trébuche sur le piège classique de l’Unreal Engine 5 : des baisses de framerate apparaissent lors de longues sessions. Le rythme posé les rend supportables, mais un patch est indispensable. Côté technique, bonne surprise : aucun bug gênant ni crash, seulement quelques textures en basse résolution, même dans certaines cinématiques.

Visuellement, Cronos est cohérent et superbe. Les environnements sont richement détaillés, l’éclairage est splendide. Les animations des PNJ auraient mérité un motion capture plus soigné, mais l’ensemble convainc largement. Côté audio, le jeu mise sur une bande-son minimaliste dominée par les bruits d’ambiance, et cette retenue renforce encore la tension.

 

 

Quand Les Idées Tournent Court

 

Toutes les idées de Bloober ne fonctionnent pas parfaitement. La mécanique de « fusion », star des bandes-annonces, ne tient pas toujours ses promesses. Ne pas brûler les ennemis permet aux autres de fusionner avec eux et d’hériter de leurs capacités : un infecté agile peut soudain cracher du poison après avoir absorbé les restes d’une créature. En théorie, c’est passionnant, mais les munitions du lance-flammes sont si limitées que j’ai dû souvent parcourir de longues distances pour refaire le plein. Résultat : un backtracking agaçant, surtout si l’on cherche à jouer de façon optimale. Même si la capacité du lance-flammes peut être améliorée, le système reste mal calibré.

Le héros peut aussi écraser les ennemis au sol, à la manière d’Isaac Clarke dans Dead Space, mais cela ne suffit pas à empêcher d’autres monstres de les utiliser pour fusionner. Une bonne idée, mais qui nécessite clairement des ajustements.

 

 

Le Véritable Tournant de Bloober

 

Les reproches majeurs sont rares. Les petites baisses de framerate sur PS5 sont devenues presque une tradition, mais en dehors de ça, Cronos est splendide visuellement et encore plus convaincant auditivement. Certains jugeront peut-être que l’histoire tire un peu en longueur, mais j’ai été captivé du début à la fin. Objectivement, certaines sections auraient mérité un peu plus de dramaturgie, mais l’expérience reste impressionnante.

C’est le triomphe de Bloober Team. Alors que Silent Hill 2 Remake symbolisait le retour pour beaucoup, ce n’était au final qu’une relecture. Cronos est totalement original – et il n’y a pas de meilleur mot que chef-d’œuvre. Bloober prouve enfin qu’il peut s’imposer par ses propres moyens. Ce n’est pas juste un jeu d’horreur de plus : c’est l’accomplissement de leur vocation.

-Gergely Herpai “BadSector”-

Pro :

+ Atmosphère raffinée et narration maîtrisée
+ Expérience de survival horror tendue grâce à la fusion
+ Environnements superbes et éclairage réussi


Contre :

– Munitions limitées, backtracking frustrant
– Bestiaire restreint
– Baisse de framerate par moments sur PS5


Éditeur : Nacon
Développeur : Bloober Team
Genre : Survival Horror
Sortie : 5 septembre 2025

Cronos: The New Dawn

Jouabilité - 8.8
Graphismes - 8.6
Histoire - 8.4
Musique/Audio - 8.2
Ambiance - 8.6

8.5

EXCELLENT

Cronos: The New Dawn est le meilleur jeu de Bloober Team à ce jour, combinant atmosphère suffocante, mécanique de survival horror tendue et récit original. Malgré quelques faiblesses techniques et des déséquilibres de gameplay, l’ensemble s’impose parmi les références du genre. Ce n’est pas juste un autre jeu d’horreur : c’est le véritable tournant du studio.

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BadSector is a seasoned journalist for more than twenty years. He communicates in English, Hungarian and French. He worked for several gaming magazines – including the Hungarian GameStar, where he worked 8 years as editor. (For our office address, email and phone number check out our impressum)

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