TEST – Mafia: The Old Country nous transporte aux origines du crime organisé, dans la Sicile du début du XXe siècle. Dans ce nouvel opus, on incarne Enzo Favara, un jeune mafieux local dont l’ascension fulgurante au sein de la famille d’un Don influent sera jalonnée de sang, de trahisons et de missions périlleuses. Entre fidélité, honneur et coups de couteau dans le dos, Enzo devra prouver sa valeur pour gagner la confiance de ses pairs et de son patron. Et je vais vous dire d’emblée quelque chose de fort : selon moi, c’est tout simplement le meilleur épisode de la saga Mafia à ce jour – et après le générique final, je n’avais plus aucun doute.
Retour en 2002. À l’époque, j’écrivais pour GameStar à propos de Mafia: The City of Lost Heaven. Sorti peu après Grand Theft Auto III, le jeu tchèque d’Illusion Softworks m’avait pourtant bien plus marqué que le mastodonte de Rockstar. Pourquoi ? Parce que tout comme Half-Life à son époque, Mafia a redéfini la narration dans le jeu vidéo. Là où GTA III enchaînait des missions sans grande cohérence, Daniel Vávra et son équipe ont livré une fresque cinématographique intense, avec une histoire tragique digne du grand écran, jusqu’à un final cathartique qui m’a scotché à mon écran.
Il a fallu attendre 2010 pour une suite. Mais Mafia II était à mes yeux un véritable chef-d’œuvre. Inspiré des films de mafieux signés Scorsese, ce volet brillait par sa mise en scène, ses trahisons, ses personnages bien écrits et un gameplay musclé à la troisième personne. Contrairement à GTA, ici pas de monde ouvert fourre-tout : Mafia est resté fidèle à sa structure linéaire, misant sur un récit fort et immersif – et c’est ce qui faisait sa singularité.
Mafia III, en 2016, a hélas rompu cet équilibre. En voulant coller aux mécaniques des mondes ouverts à la GTA, le jeu s’est noyé dans des systèmes de gestion criminelle répétitifs et peu inspirés, qui n’ont fait qu’étirer artificiellement sa durée de vie. Une mauvaise piquette là où on attendait un bon vieux bourbon sicilien.
En 2020, Hangar 13 a rectifié le tir avec un retour aux sources. Mafia: Definitive Edition – malgré quelques limites de game design – m’avait franchement emballé. (Voir notre critique complète) Alors qu’a donc The Old Country de plus pour prétendre au trône de la franchise ? Assez de blabla, passons à table : spaghetti narratif al dente.
Là où la musique sicilienne fait bouillir le sang
D’emblée, mettons les choses au clair : Mafia: The Old Country est un véritable Mafia. Peu importe son prix plus doux ou la communication ambiguë d’avant-sortie : il s’agit bien du quatrième opus principal. Avec un scénario plus long que jamais, un monde vaste et ouvert, et une direction artistique au sommet, ce titre coche toutes les cases.
Dès le menu principal, on est accueilli par un thème musical digne des meilleures séries TV. La bande-son est somptueuse : thèmes de combat, musiques d’ambiance pour les trajets, morceaux liés aux lieux – tout a été pensé pour immerger le joueur. Les cinématiques n’ont jamais été aussi crédibles : expressions faciales fines, textures de vêtements ultra-détaillées, chaque scène donne l’impression de jouer dans un film… dont vous êtes le héros.
Mais le véritable joyau, c’est la Sicile. Du moindre village aux vignobles, en passant par les temples et les mines, chaque recoin est accessible, vivant, crédible. Sur PS5, en mode qualité, le jeu tourne parfaitement. Aucun bug gênant, aucun ennemi téléporté, aucun véhicule volant – tout fonctionne comme sur des roulettes. À un détail près : Cesare s’est mis une fois à courir dans le vide sans raison.
Ce monde n’est pas juste un décor, c’est le cœur du récit. Les développeurs ne se sont pas contentés de Google Images : ils ont visité l’île, et cela se ressent à chaque instant. L’artbook numérique et les commentaires audio inclus dans l’édition Deluxe le confirment – un vrai régal pour les passionnés de lore.
Le gameplay a lui aussi fait un bond en avant depuis Definitive Edition. Les combats sont plus nerveux, le système de couverture fluide, l’escalade naturelle. L’arsenal est plus varié que jamais, avec de nouvelles armes déverrouillées au fil des années dans le scénario. La conduite – qu’elle soit automobile ou équestre – est solide, avec une ambiance sonore immersive.
L’infiltration n’est pas en reste : les exécutions au corps à corps nécessitent des combinaisons, tandis que les attaques au couteau sont plus rapides mais usent la lame. Heureusement, une pierre à aiguiser permet de restaurer l’arme, surtout si vous l’utilisez pour crocheter ou neutraliser. Bouteilles, pièces jetées – les distractions classiques sont là, et les animations d’élimination sont aussi variées que brutales. Clairement, c’est l’épisode le plus agréable à jouer de la série.
Et ce n’est pas tout : certaines séquences clés introduisent des duels au couteau. Surprenants au début, ces affrontements sont finalement une excellente surprise. Esquives, contre-attaques, brise-garde, coups imparables – le tout compose un système tactique solide. Et cerise sur le gâteau : c’est votre mentor qui vous les enseigne, une fois qu’il prend Enzo sous son aile.
Sicile, chevaux poilus et costumes sur mesure
Les modèles 3D – voitures, chevaux, bâtiments, tenues, armes – frôlent la perfection. Les fans d’exploration apprécieront le mode libre, de retour comme dans Mafia: Definitive Edition, permettant de vagabonder, collectionner, sans aucune contrainte narrative. Les développeurs ont d’ailleurs promis du contenu supplémentaire après le lancement – on reste à l’affût.
La conduite est personnalisable à souhait : modèles, couleurs, et oui… vous pouvez même caresser votre cheval. Enzo, lui, peut être customisé de la tête aux pieds : chemises, bretelles, costumes, coiffures, barbes, chapeaux, fedora, trilby – tout le style mafieux d’époque est là, à débloquer au fil du scénario.
La famille avant tout
L’histoire débute avec Enzo Favara, vendu par son père à une mine à l’âge de cinq ans. Le destin le mène au domaine de Don Torrisi, où il se rapproche rapidement de la fille du Don, Isabella. Mais en raison de ses origines modestes, elle lui est d’abord inaccessible. Déterminé à gagner la confiance du Don et, peut-être un jour, la main de sa fille, Enzo s’engage sur un chemin semé d’épreuves, d’alliances et de trahisons, jusqu’à se fondre entièrement dans le monde mafieux.
La relation entre Enzo et Isabella est au centre du récit. Leur amour secret, dans un monde de traditions rigides et de secrets, est fragile. Et tout ne se passe pas toujours bien entre eux…
Cesare est le premier ami d’Enzo : d’abord méfiant, il devient vite un partenaire fidèle, à la manière de Joe ou Paulie dans les précédents opus. Plein d’humour mais en quête d’estime, il cherche lui aussi à briller aux yeux du Don.
Puis vient Luca, le mentor d’Enzo. Un homme rusé, diplomate, loyal à sa famille. Il apprend à Enzo les ficelles de la survie en Sicile. Les vétérans reconnaîtront peut-être son nom de famille…
Don Torrisi incarne l’autorité. Parti de rien, il a bâti un empire et ferait n’importe quoi pour protéger sa fille. Craint en coulisses, respecté en façade, il est l’archétype du parrain charismatique et redoutable.
Enfin, Tino, le Consigliere de la famille : il observe tout, anticipe les dangers, et repère immédiatement quand un jeune caruso grimpe un peu trop vite dans la hiérarchie…
Un air de déjà-vu, mais en mieux
Le scénario est linéaire, mais porté par une écriture soignée. Les connaisseurs de la saga ou du genre devineront certains rebondissements – mais ce n’est pas un défaut. Inutile de réinventer la roue quand la formule fonctionne aussi bien. Les personnages, les conflits, la tension entre loyauté et trahison – tout cela rend hommage aux deux premiers volets. The Old Country se suffit à lui-même, même sans avoir joué aux précédents. Les fans, eux, seront comblés par les clins d’œil, les noms familiers, les lieux emblématiques. Le doublage, les cinématiques, la finition technique – tout est d’un niveau supérieur. Si vous avez aimé le remake de 2020, celui-ci vous fera chavirer.
Petite précision : malgré ce que la communication laissait entendre, ce n’est pas une « origin story » sur la naissance de la mafia. Il s’agit d’un récit personnel – celui d’un jeune homme qui intègre une famille mafieuse, un peu comme Tommy Angelo dans le premier jeu. On parle ici de loyauté, de vengeance, d’amour, de caisses à porter, de beuveries… et même d’envies pressantes. Le pur esprit Mafia. Si un jour on veut retracer les véritables origines de la Cosa Nostra, il faudra remonter au XIXe siècle. Peut-être que ce sera pour un prochain opus.
« Subblimi ! »
Mafia: The Old Country est une leçon de narration, une réussite technique, et peut-être le meilleur épisode de la série. Préquelle, spin-off ou suite – peu importe, il excelle dans tous les registres. La production est irréprochable : scénario, mise en scène, graphismes, musiques, gameplay, options de personnalisation – tout est au top. Hangar 13 n’a lésiné sur rien, malgré un prix plus doux que la moyenne.
Si c’est ça leur « petit jeu », alors j’ai hâte de voir leur prochain « grand projet ». Chez moi, aucun bug, aucune instabilité : l’expérience était fluide comme une rafale de tommy gun bien placée. Les fans débattront longtemps pour savoir où classer cet opus. Moi ? Il a détrôné les deux premiers dans mon cœur.
-Gergely Herpai „BadSector-
Pro :
+ Une Sicile somptueuse, immersive et crédible
+ Un gameplay riche et varié
+ Doublage impeccable et bande-son magistrale
Contre :
– Une histoire parfois prévisible, avec quelques incohérences
– Les duels au couteau deviennent trop simples une fois maîtrisés
– Le jeu effleure à peine les vraies origines de la mafia
Éditeur : 2K
Développeur : Hangar 13
Genre : Action-aventure, TPS, narratif
Date de sortie : 15 août 2025
Mafia: The Old Country
Jouabilité - 9.2
Graphismes - 9.4
Histoire - 8.3
Musique/Audio - 9.2
Ambiance - 9.5
9.1
SUPERBE
Mafia: The Old Country est un retour aux sources stylé, profond et techniquement impressionnant. Des personnages marquants, une bande-son envoutante, un univers cohérent et soigné – c’est sans doute le meilleur épisode à ce jour. Et pour la première fois, je dis : oui.