CRITIQUE DE SÉRIE – Nous avons visionné l’intégralité de Hunyadi: Rise of the Raven sur Netflix, une fresque historique hongroise financée à hauteur de 16 milliards de forints d’argent public. Après deux premiers épisodes particulièrement poussifs, la série s’est nettement améliorée pour culminer dans un final spectaculaire consacré au siège de Belgrade. Mais cette production nationale est-elle à la hauteur des grandes fresques historiques internationales proposées par Netflix ?
Hunyadi: Rise of the Raven est à ce jour la série hongroise la plus coûteuse jamais réalisée – non seulement en termes de production, mais surtout par son financement public massif. Sur les 25,6 milliards de forints de budget total, 16 milliards proviennent directement des contribuables. Rien d’étonnant donc à ce que la série ait suscité une certaine méfiance, d’autant que ses premiers épisodes accumulaient dialogues plats, performances ternes et un langage anachronique déconcertant. La controverse critique n’a pas tardé à éclater.
Heureusement, les épisodes suivants ont démontré un réel potentiel. Après avoir regardé l’intégralité de la saison en 4K, sur vidéoprojecteur, nous pouvons enfin porter un jugement global sur cette ambitieuse reconstitution historique.
Réalisation inégale, interprétation en progrès
La série a été confiée à plusieurs réalisateurs, ce qui entraîne des variations de ton et de qualité selon les épisodes. Mais globalement, la courbe est ascendante : certaines séquences sont réellement maîtrisées, tant dans la tension dramatique que dans la mise en scène des batailles. Gellért Kádár, dans le rôle-titre, ne deviendra certes pas le Daniel Day-Lewis hongrois, mais il parvient peu à peu à abandonner son jeu trop théâtral du début. Son discours avant la bataille de Varna rappelle parfois le souffle épique de Braveheart — sans forcément l’égaler, mais l’intention est là.
Dans les seconds rôles, Franciska Törőcsik (Maria Brankovic) tire son épingle du jeu, tout comme Murathan Muslu, impressionnant en sultan ottoman — bien qu’il ne parle pas un mot de turc, malgré ses origines. Malheureusement, le jeu trop ampoulé et la diction surarticulée, typiques de la formation théâtrale hongroise, sont encore bien présents chez certains acteurs, comme Vivien Rujder (Élisabeth Szilágyi) ou László Gálfi (le roi Sigismond).
Écriture plus affûtée, narration plus dense
Le scénario et les dialogues gagnent nettement en profondeur dans la seconde moitié de la saison. Les intrigues sentimentales laissent place à des enjeux politiques plus complexes, notamment avec l’apparition de Vlad Tepes (Gábor Nagypál), modèle supposé de Dracula, présenté ici comme un stratège impitoyable jouant un double jeu avec les Ottomans. Les deux batailles majeures — Varna et surtout le siège de Belgrade — constituent les points culminants de la série. Cette dernière impressionne par sa mise en scène, sa chorégraphie martiale et ses scènes de masse sanglantes. Malgré des limites budgétaires perceptibles, le résultat se rapproche du standard international.
Le principal défaut structurel réside dans des ellipses temporelles trop abruptes. Le récit donne parfois l’impression d’un condensé, manquant de souffle et d’espace pour développer ses arcs narratifs. Une histoire de cette ampleur aurait mérité au moins deux saisons complètes pour pleinement s’épanouir.
Une place à prendre dans l’arène historique de Netflix ?
Face à des références comme The Last Kingdom, Vikings, Vikings: Valhalla ou Barbares, Hunyadi ne joue pas encore dans la même cour. Les personnages sont moins nuancés, les dialogues manquent parfois de naturel, et la narration connaît des flottements. Mais à une époque où Netflix mise moins sur les grandes fresques historiques, cette série hongroise tombe à pic. Elle occupe un créneau déserté avec un sérieux suffisant pour laisser espérer un renouveau régional du genre.
– Gergely Herpai « BadSector » –
Hunyadi: Rise of the Raven
Direction - 7.3
Acteurs - 6.6
Histoire - 7.2
Visuels/Musique/Sons - 8.2
Ambiance - 7.8
7.4
BON
Hunyadi: Rise of the Raven dépasse largement ses débuts laborieux. Sans être révolutionnaire, la série s’impose comme une production solide, parfois impressionnante, et pose les bases d’un avenir prometteur pour la fiction historique hongroise. Si cette dynamique se confirme, elle pourrait bien devenir la norme plutôt que l’exception.