RETRO – « Heaven’s got a Hitman » – c’était autrefois le slogan de Painkiller, et il pourrait aussi bien être celui du nouveau TPS de Bits Studio. Dans Constantine, nous incarnons un chasseur d’esprits cynique atteint d’un cancer du poumon, qui tente de sauver l’humanité de l’annihilation totale au cœur du conflit éternel entre anges et démons. Constantine fête ses 20 ans cette année, c’est l’occasion pour nous de ressortir ce test.
Les adaptations cinématographiques de bandes dessinées vivent actuellement leur âge d’or. Après Spider-Man, X-Men, Hulk et The Punisher, c’est cette fois une série de comics européens moins connue dans nos contrées, le Hellblazer, qui est portée à l’écran. Contrairement aux super-héros habituels, le protagoniste Constantine est un personnage désabusé, cynique et mourant, qui doit sa survie à sa maîtrise des forces occultes. Le Vatican, travaillant comme « agence » du Paradis et de Dieu, peut d’ailleurs lui être reconnaissant, car Constantine utilise notamment ses talents pour traquer et renvoyer les démons en enfer.
Le rôle principal est décroché par Keanu Reeves, au plus grand bonheur des fans de Matrix et à la grande frustration des lecteurs du comic original (le Constantine papier ressemble davantage au blond Sting et vit à Liverpool, en Angleterre, non à Los Angeles). Bien que le film ne soit pas encore sorti chez nous, il a reçu des critiques plutôt positives. Ce qui nous intéresse ici, c’est surtout que nous pouvons déjà nous plonger dans le jeu basé sur le film, avec Keanu Reeves en vedette…
Neo, le chasseur de démons
Dès la scène d’introduction, Constantine/Reeves entre dans un appartement délabré où une femme est attachée sur un lit. Ceux qui ont vu L’Exorciste sauront immédiatement ce qui les attend : Constantine va sans doute chasser le démon hors de son corps à l’aide de rituels occultes. Sans tout dévoiler, sachez que c’est l’une des introductions les plus marquantes de ces dernières années. Ensuite, notre héros se retrouve dans son bureau sombre et décrépit, où Beeman, son seul ami et allié, lui expose la situation.
Malheureusement, les développeurs n’ont pas pris la peine d’expliquer suffisamment l’univers du jeu aux non-initiés, comme ce fut le cas pour Enter the Matrix : beaucoup d’éléments de background, comme les origines de Constantine et ses liens avec les mondes terrestre et surnaturel, nécessitent d’avoir vu le film. C’est particulièrement frustrant pour nous autres francophones, car si Matrix avait été diffusé parallèlement à son adaptation vidéoludique, Constantine n’arrivera que bien plus tard en salle. Malgré cela, les nombreux cinématiques de haute qualité aident à suivre l’intrigue, même si l’on passe à côté de certains détails sans le film.
Une traversée directe
Le gameplay repose sur les bases classiques des anciens TPS. Ceux qui se souviennent de la saga Legacy of Kain ne seront pas surpris d’apprendre que Constantine peut naviguer entre deux plans d’existence : la Terre et l’Enfer. Pour voyager en Enfer, il doit se tenir dans une flaque d’eau et réciter un sort occulte ; sur l’autre rive, il devra briser des fioles d’eau bénite.
Comme dans LoK, l’Enfer est une version démoniaque des lieux réels : musées décrépits, rues dévastées, bâtiments en ruines illuminés par des flammes infernales. Ce n’est pas d’une grande originalité, mais cela fonctionne dans l’univers de Constantine. Dommage cependant que, contrairement à Legacy of Kain, la transition entre les deux plans ne soit possible qu’à certains endroits précis du jeu. Généralement, on doit changer de dimension pour contourner un obstacle infranchissable sur Terre. L’idée est correcte, mais la solution est souvent trop évidente, ce qui gâche quelque peu la réflexion.
« Dites donc Constantine, ne se serait-on pas déjà croisés ? »
Constantine ne cache pas son inspiration tirée d’autres jeux : le personnage ressemble trait pour trait à Max Payne. Comme dans le titre de Remedy, la plupart des affrontements se règlent à coups d’armes à feu, sauf qu’ici nous renvoyons des démons en Enfer avec un fusil à pompe « sacré ». Malgré des noms fantaisistes, les armes restent très classiques.
Le gameplay ne diffère pas beaucoup de celui de Max Payne ou de The Suffering, ce qui est un point positif : une maniabilité classique reste préférable à une expérimentation ratée. Sur PC, la visée à la souris est impeccable. Mon seul reproche : le début est plutôt lent, avec peu d’ennemis. Heureusement, l’action devient plus intense par la suite, avec des hordes de démons surgissant dans l’obscurité pour tenter d’arracher les poumons cancéreux de Constantine…
Harry Potter… en version hardcore
Pour varier un peu, Constantine peut aussi utiliser des sorts occultes comme des éclairs, des exorcismes ou des boucliers divins. Bien que ces pouvoirs soient assez conventionnels, ils s’intègrent bien au gameplay.
À la manière des jeux Harry Potter, il faut enchaîner des combinaisons de touches spécifiques pour lancer les sorts. Heureusement, le temps ralentit pendant la manipulation, ce qui laisse le temps de réussir. Dommage que certains sorts soient beaucoup plus efficaces que d’autres, en particulier l’éclair, qui devient presque une arme abusive face aux ennemis standards.
Couleur locale
La représentation de l’Enfer est impressionnante, avec ses vagues de chaleur, ses ruines infernales et ses carcasses de voitures flottantes. Les décors sont très soignés.
Les environnements terrestres, en revanche, sont nettement plus banals et génériques, voire ennuyeux. De plus, l’abus d’obscurité pour créer une ambiance angoissante devient vite lassant, nécessitant souvent d’activer une « vision démoniaque » similaire à des lunettes de vision nocturne.
Quant aux personnages, Keanu Reeves est plutôt réussi. Malheureusement, la modélisation de Rachel Weisz laisse franchement à désirer, ressemblant davantage à une célébrité hongroise inconnue qu’à l’actrice elle-même. Les monstres sont en revanche bien plus convaincants, même si certains semblent avoir été copiés sans vergogne du jeu The Suffering…
Regarde-le, termine-le, oublie-le !
Constantine est typiquement un TPS à jouer après avoir vu le film : relativement court, facile et divertissant, mais qu’on ne relancera probablement jamais une seconde fois. Parfait pour un week-end tranquille après une séance ciné.
-BadSector-(2005)
Pour :
+ Adaptation cinématographique réussie et immersive
+ Histoire intéressante avec de nombreuses cinématiques
+ Gameplay fluide et accessible
Contre :
– Trop simple, facile et court
– Lieux souvent trop sombres
– Idées de gameplay recyclées
Éditeur : THQ
Développeur : Bits Studios, SCi Games
Genre : Action, TPS
Date de sortie : 2005
Constantine
Jouabilité - 8.5
Graphismes (2005) - 7.6
Histoire - 7.8
Musique/audio - 8.2
Ambiance - 8
8
EXCELLENT
Au fond, Constantine est un jeu de tir à la troisième personne assez classique, agrémenté de quelques scènes vraiment marquantes — en particulier les visions cauchemardesques et saisissantes de l'Enfer — mais alourdi par les sections beaucoup moins intéressantes se déroulant à Los Angeles. Ce qui le distingue finalement de la masse, c’est son histoire captivante et son lien étroit avec le film. Cette connexion lui donne un caractère unique, le rendant bien plus mémorable qu’il ne l’aurait été autrement.