ACTUALITÉS CINÉMA – Tout le monde se souvient du thriller surnaturel controversé de M. Night Shyamalan sorti en 2016, Split. Salué par de nombreux fans d’horreur pour son intrigue haletante, ses thèmes complexes et l’interprétation impressionnante de James McAvoy, incarnant sans effort 24 personnalités différentes en Kevin Wendell Crumb, le film a également suscité de vives critiques. La représentation du trouble dissociatif de l’identité (TDI) par Shyamalan, notamment par la création du monstre “The Beast”, a été perçue par certains comme stigmatisante pour les personnes atteintes de troubles mentaux.
Le réalisateur a reconnu s’être fortement inspiré de l’affaire réelle de Billy Milligan, première personne à avoir plaidé la folie en invoquant le TDI et à avoir été acquittée. Comparer Milligan à Kevin éclaire mieux certains choix scénaristiques controversés. L’intrigue commence avec Kevin enlevant trois adolescentes dans un parking, avant de plonger le spectateur dans son combat troublant contre ses multiples personnalités jusqu’à un final défiant les genres.
Compte tenu de la stigmatisation persistante autour des maladies mentales, il est crucial de distinguer les faits de la fiction dans ce type de récit. Voici tout ce qu’il faut savoir sur l’affaire Milligan qui a inspiré Split et sur la fidélité du film à la réalité.
Bien que Kevin soit un personnage fictif, sa création repose largement sur l’histoire réelle de Billy Milligan. Arrêté en 1977 pour vols, enlèvements et viols sur trois femmes, Milligan a déclaré, lors d’une évaluation psychiatrique, souffrir de TDI, accusant une de ses 24 personnalités des crimes commis. Son diagnostic a été confirmé par neuf experts différents, dont la célèbre Dr. Cornelia Wilbur, également connue pour son implication controversée dans l’affaire *Sybil*, un cas par la suite discrédité.
En 1978, Milligan est déclaré non coupable pour cause d’aliénation mentale et interné. Son verdict s’est appuyé sur de nombreux témoignages relatant ses changements de personnalité, un passé d’abus sexuels présumés infligés par son beau-père, ainsi que des antécédents psychiatriques. Après huit ans d’hospitalisation — et une brève évasion — il est finalement libéré en 1988, jugé réhabilité.
Milligan est décédé en 2014 d’un cancer, mais son histoire continue d’alimenter livres, documentaires et séries depuis près de cinquante ans.
Split : fidèle ou non à l’histoire vraie ?
Shyamalan s’est inspiré de certains éléments de l’affaire Milligan pour construire Kevin, mais a aussi pris beaucoup de libertés. Si Kevin enlève trois jeunes filles comme Milligan, il ne les agresse pas sexuellement dans le film. De plus, Milligan n’a jamais tué ses victimes, tandis que Kevin en tue deux, laissant Casey (Anya Taylor-Joy) comme seule survivante.
À travers le passé tragique de Casey, victime d’abus sexuels par son oncle, le spectateur découvre aussi les traumatismes d’enfance de Kevin. Un flashback révèle que sa mère, violente, le battait, ce qui aurait conduit à l’apparition du TDI et à la naissance de The Beast. Si les traumatismes de Milligan ont également mené à son trouble dissociatif, ils n’ont jamais généré une personnalité dotée de forces surhumaines. Bien que Milligan et Kevin partagent 24 personnalités, The Beast reste une pure invention fantastique.
La fascination de Shyamalan pour le TDI
La fascination de Shyamalan pour le TDI remonte aux années 1990, lorsqu’il a lu la biographie récompensée de Daniel Keyes, *The Minds of Billy Milligan*. Bien que James Cameron ait un temps envisagé d’adapter l’ouvrage, le projet a échoué. Shyamalan a alors juré qu’il s’en chargerait. Il écrit un premier script en 2001 et, après quinze ans de recherches, de réécritures et de casting minutieux, donne enfin naissance à Split, son projet de cœur.
Malgré un final controversé et sensationnaliste, Split propose une approche sérieuse du TDI au travers de Kevin et des performances habitées de McAvoy. Dans un monde où l’existence même des troubles mentaux est encore parfois niée, cela reste significatif. Si l’écart entre réalité et fiction dans le film peut être critiqué, la tentative d’explorer la complexité de l’esprit humain à travers le TDI mérite d’être saluée.
Source: MovieWeb