CRITIQUE DE SÉRIE – Lorsque Catherine Ravenscroft (Cate Blanchett), une productrice de documentaires reconnue, reçoit un mystérieux livre par la poste, l’avertissement inquiétant sur la première page capte immédiatement son attention : « Toute ressemblance avec des personnes réelles, vivantes ou mortes, n’est pas purement fortuite. » Ce qui commence comme une simple curiosité se transforme rapidement en angoisse, alors que les pages du roman réveillent des souvenirs enfouis depuis longtemps.
Stephen Brigstocke (Kevin Kline) savait parfaitement ce qu’il faisait. Catherine ignore que ce veuf solitaire et rancunier l’observe depuis des années. Envoyer ce livre n’était que la première étape d’un plan méticuleusement élaboré pour exposer ses secrets les plus sombres et détruire complètement sa vie.
Inspiré d’un best-seller de thriller
S’il fallait une preuve supplémentaire, Disclaimer sur Apple TV+ montre bien que Nicole Kidman ne peut pas jouer dans toutes les adaptations de romans à succès. Cela ne signifie pas pour autant que Cate Blanchett se contente des « restes » de Kidman — loin de là. Cette mini-série illustre l’excellence de la création télévisuelle, portée par Alfonso Cuarón, réalisateur, scénariste et créateur de la série. Lauréat d’un Oscar pour Les Fils de l’homme et Gravity, Cuarón démontre une fois de plus pourquoi il est considéré comme l’un des plus grands visionnaires du cinéma contemporain. Bien que Disclaimer ne soit disponible sur Apple TV+ qu’en octobre, la série a fait ses débuts au Festival de Venise, et elle dégage une sophistication et un prestige qui caractérisent la télévision haut de gamme.
Pour autant, Disclaimer s’inscrit parfaitement dans la lignée des séries limitées récentes inspirées de thrillers populaires, comme The Undoing, Big Little Lies ou Nine Perfect Strangers. Son intrigue repose avant tout sur la curiosité du spectateur : ce désir insatiable de découvrir la vérité. Les critiques ont dû visionner les sept épisodes, car l’histoire ne prend tout son sens qu’avec la révélation finale — une révélation qui, malheureusement, ne livre pas entièrement la satisfaction escomptée.
Là où Disclaimer brille, c’est dans son travail minutieux. L’attention méticuleuse de Cuarón aux détails insuffle vie à la série comme peu d’autres réalisateurs pourraient le faire. Chaque scène respire l’authenticité, qu’il s’agisse de la maison délabrée d’un vieux professeur ou des bureaux ultra-modernes d’une société de production. Rappelez-vous de la touche particulière qu’il avait apportée à Harry Potter et le Prisonnier d’Azkaban. Ici, cette même magie transforme des lieux banals en cadres mémorables, prouvant que même les décors les plus simples peuvent devenir extraordinaires avec le bon œil cinématographique.
Les chats volent la vedette
La splendeur visuelle de Disclaimer doit beaucoup au travail des directeurs de la photographie Emmanuel Lubezki et Bruno Delbonnel, qui capturent aussi bien la beauté que la dureté de la vie. Leurs choix d’éclairage confèrent à de nombreuses scènes une qualité presque picturale, faisant de chaque plan une œuvre d’art. La narration évocatrice d’Indira Varma s’intègre parfaitement à l’ambiance de la série. Elle évoque les racines littéraires de l’histoire tout en enrichissant la profondeur émotionnelle de chaque scène et en sublimant les performances déjà impressionnantes des acteurs.
Et voici une note spéciale pour les amoureux des chats : Disclaimer met en scène deux félins mémorables, qui déambulent avec l’assurance désinvolte des chats d’intérieur persuadés que le plateau de tournage est leur territoire. Si Alfonso Cuarón ne reçoit pas une nomination aux Emmy rien que pour cela, ce serait une injustice.
Sur le plan technique, toute l’équipe excelle, mais la performance de Cate Blanchett reste le joyau de cette série. Elle incarne Catherine avec une maîtrise époustouflante, capturant chaque nuance de son personnage, de la vulnérabilité à la détermination glaciale. Son jeu approfondit l’histoire et plonge le spectateur dans les conflits intérieurs de Catherine, rendant ses peurs et ses désirs presque palpables. Une fois encore, Blanchett prouve pourquoi elle est l’une des plus grandes actrices de sa génération.
Quant à Kevin Kline, il revient enfin à l’écran dans un rôle à la hauteur de son talent, après des années passées dans l’ombre. (Sans vouloir critiquer Bob’s Burgers, où il reste un pilier.) Dans le rôle de Stephen, il explore avec brio les facettes les plus sombres de la nature humaine, suscitant à la fois l’empathie et le dégoût du spectateur. La série comprend également des flashbacks utilisant des technologies de rajeunissement pour montrer un Kevin Kline plus jeune de 20 ans, avec des résultats tellement réussis qu’ils en deviennent presque troublants.
Déjà-vu ?
Le principal défaut de Disclaimer ne réside pas dans sa réalisation, mais dans son scénario. Malgré son excellence technique, l’histoire elle-même peine à s’affranchir des conventions du genre. Malgré les talents extraordinaires impliqués dans ce projet, y compris la direction visionnaire de Cuarón, la série rappelle trop d’autres adaptations de thrillers populaires, en particulier ceux que l’on trouve dans la section Gillian Flynn des librairies.
Bien sûr, se plaindre de cela revient à critiquer l’évidence : après tout, Disclaimer est l’adaptation d’un tel roman. Mais la série s’appuie trop lourdement sur des clichés familiers, rendant certaines scènes prévisibles, voire ennuyeuses. La tension, censée culminer dans une révélation explosive, ne parvient pas à livrer l’intensité et la surprise attendues.
Ce manque d’originalité narrative finit par nuire au travail remarquable des acteurs. Outre Blanchett et Kline, Lesley Manville brille dans plusieurs scènes de flashback, Sacha Baron Cohen étonne par sa capacité à jouer sérieusement, et Kodi Smit-McPhee fait de son mieux avec un rôle ingrat de « fils adulte boudeur constamment collé à son téléphone ». Pourtant, même ce casting exceptionnel ne parvient pas à compenser les faiblesses du scénario.
Le plus grand mystère de Disclaimer n’est pas ce qui est arrivé à Catherine des années plus tôt. C’est plutôt ce qui a poussé Alfonso Cuarón, un réalisateur reconnu pour son originalité, à s’investir dans ce projet. Qu’est-ce qui l’a tant captivé dans cette histoire ?
Dans une note adressée aux journalistes, Cuarón a expliqué qu’il avait été inspiré par « la complexité thématique et des personnages » du roman de Renée Knight, ainsi que par l’idée d’explorer « comment nos croyances les plus profondes – souvent nos vertus – façonnent notre perception de la réalité » à travers différents langages cinématographiques. Malheureusement, ces ambitions élevées ne se traduisent pas entièrement à l’écran. Tous les autres éléments de la production atteignent un niveau d’excellence élevé, sauf l’intrigue, qui devient parfois frustrante.
Alfonso Cuarón reste l’un des plus grands réalisateurs de notre époque, et Disclaimer le confirme. Espérons que son prochain projet associera ce talent exceptionnel à une matière première plus solide.
-Gergely Herpai „BadSector”-
Disclaimer
Direction - 8.4
Acteurs - 8.2
Histoire - 7.1
Visuels/Musique/Sons - 8.1
Ambiance - 7.4
7.8
BON
Disclaimer mélange un drame envoûtant à une réalisation de haute volée, porté par des performances remarquables de Cate Blanchett et Kevin Kline. Bien qu’elle ne transcende pas son genre à cause de son recours aux clichés, la direction de Cuarón et son souci du détail subliment chaque scène. Une série recommandée pour les amateurs de drames psychologiques sombres avec un casting d’exception.