CRITIQUE DE SÉRIE – Il semble que le dernier mantra des fournisseurs de services de streaming soit de produire des séries que l’on peut qualifier de “Jack Ryan au féminin”. Il s’agit de thrillers d’espionnage où la frontière entre le bien et le mal est clairement tracée et où le protagoniste est toujours une femme charismatique et sympathique. L’année dernière, par exemple, SkyShowtime (Paramount+ aux États-Unis) a diffusé pour la première fois Special Ops : Lioness de Taylor Sheridan, qui raconte l’histoire d’une femme agent de la CIA qui devient membre d’un groupe terroriste. La série analyse en profondeur les conséquences du travail dangereux et moralement complexe des personnages, tant sur le plan professionnel que personnel, tout en délivrant des messages importants sur l’impact global de la politique étrangère des États-Unis, le tout agrémenté de séquences d’action et de dialogues mémorables.
The Veil, que FX a créée pour Hulu (et qui sera probablement ajoutée à Disney Plus tôt ou tard), qui tente une fois de plus de suivre la formule du Jack Ryan féminin, ne fait que me donner envie d’une nouvelle saison de Lioness. Car The Veil, c’est comme Lioness, mais sans le contenu profond. C’est une production coûteuse, axée sur les personnages, qui ressemble ostensiblement à une véritable “série premium”, mais qui ne l’est pas. Elle est politiquement neutre, sa narration est généralement facile à suivre, mais elle est parfois un peu confuse et d’autres fois, elle est tout simplement plate. The Veil est une série d’espionnage intelligemment conçue et relativement divertissante, mais une fois terminée, elle tombera rapidement dans l’oubli.
Secrets et trahisons
L’intrigue tourne autour d’Elisabeth Moss, qui incarne Imogen Salter (nom fictif), un agent du MI6 doté d’un talent inégalé pour percer les mensonges des gens et en extraire la vérité. Elle est également hantée par un passé mystérieux, constamment entouré de secret, dont seuls quelques indices sont révélés au cours des quatre premiers épisodes. Comme les agents durs qu’il est, il boit et fume et est, bien sûr, excellent dans son travail, mais vide à l’intérieur. Elle n’est rien d’autre qu’une véritable James Bond britannique féminine – à l’exception de l’absence de séquences d’action spectaculaires et de “glamour”.
La mission de Salter est de transporter Adilah El Idrissi (Yumna Marwan), une combattante d’ISIS, d’un camp de réfugiés à la frontière turco-syrienne vers la France, d’où elle est originaire. En chemin, Imogen doit décider si Adilah n’est qu’un membre mécontent de rang inférieur qui veut simplement rentrer chez elle pour retrouver sa fille à Paris, comme elle le prétend, ou si elle est en fait le “Djinn Al Raqqa”, un commandant de haut rang qui planifie un attentat terroriste contre les États-Unis.
Les tours et les détours
Un postulat apparemment simple, mais qui laisse place aux rebondissements et aux incertitudes, car Adilah et Imogen ne sont pas entièrement honnêtes l’une envers l’autre, mais elles ne mentent pas non plus entièrement sur ce qu’elles prétendent être. Ce qui est certain, c’est qu’elles sont tout à fait honnêtes l’une envers l’autre, du moins sur le plan émotionnel. Et comme elles ont beaucoup de choses en commun, elles s’apprécient. Au fil des premiers épisodes, alors qu’ils apprennent à se connaître, la comédie d’un couple bizarre se déploie sous la forme d’un road movie qui est aussi un mélange de Planes, Trains and Automobiles et de Homeland.
Pendant ce temps, en arrière-plan, les services secrets français et américains se disputent pour savoir qui doit diriger l’opération. Avec Malik Amar (Dali Benssalah), l’amant d’Imogen, qui représente la DGSE française, et Max Peterson (Josh Charles), qui représente la CIA, Imogen fait jouer les deux hommes l’un contre l’autre pour atteindre l’objectif de la mission, qu’elle veut mener de manière aussi indépendante que s’il s’agissait de ses propres affaires.
Un grand style, de bonnes performances, mais trop superficiel
Charles, le vétéran de In My Husband’s Defense, nommé aux Emmy Awards, se distingue à nouveau dans le rôle de l’agent américain de la CIA, à la fois cool, effronté, irritant mais d’autant plus efficace. L’actrice libanaise Yumna Marwan, qui interprète Adilah pour la première fois dans une production américaine, joue un personnage mystérieux dont la véritable identité n’est pas toujours claire, même pour elle-même.
Mais la série est vraiment portée par Moss, qui n’est pas seulement la star mais aussi le producteur exécutif de la série. Dans le rôle de la charmante Imogen, le vétéran de Mad Men et de The Handmaid’s Tale ajoute de nouvelles couches à un répertoire déjà impressionnant qui a fait de lui l’un des acteurs de télévision les plus en vue de sa génération. Son interprétation donne l’image d’un agent vraiment dangereux et glacial derrière un extérieur amical, rappelant le James Bond de Daniel Craig. Il est à la fois charmant et rusé, et grâce à ces qualités, il peut facilement prendre les gens au dépourvu et les manipuler à la perfection. Le jeu de Moss est peut-être plus routinier (bien que son accent anglais soit parfois un peu maladroit et forcé), et nous ne voyons pas la profondeur dont elle a fait preuve, par exemple, dans Brilliant Girls, mais le charisme naturel de l’actrice peut donner vie à un personnage même sous-écrit.
Le scénario de la série, écrit par le prolifique scénariste britannique Steven Knight, est cliché mais efficace. L’histoire évite les complications qui rendent souvent les films d’espionnage confus, mais elle ne devient jamais prévisible ou ennuyeuse. Le duo de réalisateurs, Daina Reed (Brilliant Girls) et Damon Thomas (Killing Eve), utilise souvent des plans aériens intelligents et élégants qui renforcent l’atmosphère des sites continentaux de la série. The Veil a été filmé en Turquie, en France et au Royaume-Uni, et ces différents lieux constituent une toile de fond étonnante pour l’action.
Trop de clichés, pas assez de profondeur et de substance
En fin de compte, The Veil met l’accent sur le style plutôt que sur la substance. La série ne se concentre pas sur les personnages ou la réalité qui les entoure. Elle ne discute pas des raisons qui ont poussé Imogen à devenir un agent de renseignement, ni des motivations d’Adilah à rejoindre ISIS. Les personnages n’ont jamais l’air d’être de vraies personnes, juste un tas de clichés et de personnages sommaires (par exemple, Adilah est une terroriste mais aussi une fan de Shakespeare – la façon dont ces deux qualités s’accordent n’est pas suffisamment développée), de sorte que The Veil reste plutôt superficiel. Il n’y a pas de message comme dans la série Lioness : “Nous ne faisons qu’élever la prochaine génération pour qu’elle devienne terroriste”. The Veil est donc une série d’espionnage passionnante, mais trop superficielle. Il s’agit de personnages qui ne se connaissent pas eux-mêmes et, malheureusement, les six épisodes de la série ne répondent à aucune de nos questions.
-Gergely Herpai (BadSector)-
Le voile
Direction - 6.2
Acteurs - 6.6
Histoire - 6.4
Visuels/Musique/Sons - 7.2
Ambiance - 6.5
6.6
CORRECT
The Veil" est un thriller d'espionnage intelligemment mis en scène, mais dont le contenu reste un peu vide et qui, en raison de sa superficialité, ne restera pas dans nos mémoires aussi longtemps que les œuvres plus sérieuses du genre. La performance charismatique d'Elisabeth Moss ajoute à la qualité de la série, mais cela ne suffit pas à compenser le manque de profondeur. Bien que la série soit divertissante, les personnages sans vie, peu développés et la prépondérance des clichés font qu'elle ne se démarque pas du thriller d'espionnage moyen.