CRITIQUE DE LA SÉRIE – Après l’énorme succès de The Gentlemen l’année dernière, il semble que Guy Ritchie cherche à se forger un nouveau rôle, celui du Britannique Taylor Sheridan. Jusqu’à récemment, il était surtout connu pour ses films élégants et rythmés, mais il se lance désormais avec assurance dans le petit écran. Une deuxième saison de The Gentlemen est déjà en préparation sur Netflix, Amazon Prime Video prépare Young Sherlock (qui, étonnamment, n’a aucun lien avec les films Downey Jr. Sherlock), et voici maintenant MobLand.
Et quel casting Ritchie a réuni pour cette série : Tom Hardy, Pierce Brosnan, Helen Mirren et Paddy Considine, tous des stars de premier plan. Disponible sur Paramount+, la plateforme qui héberge l’empire de Sheridan, il est étonnant de se rappeler que MobLand était à l’origine un préquel de Ray Donovan avant d’être réimaginé en une série dramatique moderne et originale sur les gangs. Compte tenu de la domination de Sheridan sur le monde de la télévision, il est tout à fait logique que Ritchie veuille y participer, et il a fait appel à Ronan Bennett, le créateur de Top Boy. Le résultat est une série audacieuse, pleine d’ambiance et résolument britannique.
Quelle est l’histoire de MobLand ?
Les deux premiers épisodes nous plongent directement dans l’univers de Harry Da Souza (Hardy), l’impitoyable sbire de la famille Harrigan. Harry maintient la paix depuis des années sous l’œil vigilant du patriarche Conrad (Brosnan) et de la matriarche Maeve (Mirren), veillant à ce qu’aucun gang rival ne menace leur emprise sur la ville. Pour lui, tout n’est que du business, même si cela met en péril son mariage avec Jan (Joanne Froggatt), mais il est incontestablement le meilleur dans son domaine.
La situation se dégrade lorsque le petit-fils de Conrad, Eddie (Anson Boon), se bat avec le fils du chef mafieux rival Richie Stevenson (Geoff Bell). C’est alors qu’Harry se lance dans la rue, se précipitant pour étouffer l’affaire avant qu’elle ne dégénère en une guerre des gangs. Alors qu’il se démène pour maintenir la paix, nous sommes aux premières loges du monde tordu des Harrigans, où même Kevin (Paddy Considine), le fils de Conrad, n’a pas toujours le contrôle.
Si vous avez déjà vu une saga de gangsters londoniens, vous reconnaîtrez l’univers dans lequel Ritchie évolue. Dans ces deux premiers épisodes, il est parfaitement à son aise, dressant un portrait brutal et authentique de la rue, comme une suite plus sombre et plus sordide de The Gentlemen. Certes, rien de particulièrement nouveau ici, mais le casting est tellement bon et l’atmosphère si intense que vous serez captivé de toute façon.
Tom Hardy est le cœur de MobLand
C’est fou de penser que Hardy et Ritchie n’ont pas fait équipe depuis RocknRolla en 2008. La présence sombre de Hardy correspond parfaitement à l’univers de criminels suaves et mortels de Ritchie. MobLand est peut-être un peu plus sobre que les productions habituelles de Ritchie, mais il dégage une énergie cinématographique intacte, surtout quand on se souvient que le tournage a commencé il y a seulement quatre mois. Hardy excelle dans le rôle du manipulateur cynique : il est notre fenêtre sur ce monde souterrain brutal, un homme qu’on ne devrait pas admirer, mais qu’on ne peut s’empêcher de soutenir. Après avoir incarné Eddie Brock pendant tant d’années dans les films Venom, c’est un véritable plaisir de le revoir sur son terrain, nous rappelant pourquoi il est l’un des meilleurs du métier.
Comme Ray Donovan, cette série est construite autour du manipulateur : pas d’ascension fulgurante. Les Harrigan sont déjà au sommet, et la tâche d’Harry est de le maintenir ainsi. Les meilleures scènes de la série sont celles où il affronte les Stevenson, des moments que Ritchie et Bennett transforment en une tension pure et crépitante.
De la somptueuse demeure de Conrad aux coulisses miteuses des clubs londoniens, MobLand déborde d’atmosphère. Plus sérieux que The Gentlemen, il ne devient jamais ennuyeux ni prétentieux. Si vous aimez les histoires de gangsters sombres et mélancoliques, vous allez adorer. Malheureusement, comme beaucoup trop de séries modernes, il souffre d’un problème exaspérant : tout est terriblement sombre. La moitié du temps, il est impossible de voir ce qui se passe, et les meilleurs moments d’action perdent de leur force. Vous l’aurez compris : ils voulaient quelque chose de brut et d’obscur, mais c’est plus agaçant qu’immersif quand on plisse les yeux devant son écran.
MobLand prouve que la télévision convient parfaitement à Ritchie
Soyons honnêtes : même les plus grands fans de Ritchie savent que sa carrière a été un véritable tourbillon : des hauts, des bas, et des films qui n’ont jamais vraiment marqué les esprits. Son dernier film, The Ministry of Ungentlemanly Warfare, sorti l’année dernière, était plutôt divertissant, mais n’a pas laissé une grande empreinte. Il continue de produire des films (presque comme sur des roulettes depuis 2019), mais MobLand prouve qu’il a ce qu’il faut pour percer à la télévision aussi. Cette série n’est pas aussi frénétique ou acerbe que ses meilleurs films, mais chaque scène semble soigneusement réalisée et indéniablement la sienne. Les deux premiers épisodes prennent leur temps, mais on sent la tension monter en arrière-plan – et ce n’est qu’une question de temps avant qu’elle n’explose.
La véritable magie opère lorsque Brosnan et Mirren partagent l’écran. Ces deux légendes apportent exactement ce qu’on attend : du sérieux et du charme à revendre, mais au fil des épisodes, on commence à voir les fissures dans la façade. Ces personnages peuvent paraître charmants au premier abord, mais on réalise vite qu’ils sont aussi dangereux qu’ils le paraissent, et leurs loyautés changeantes vous tiennent en haleine jusqu’aux dernières secondes.
Les Britanniques font Gangland comme il faut
Comme Sheridan avec Yellowstone et Tulsa King, Ritchie sait créer une série qui vous donnera envie d’en redemander. MobLand ne réinvente pas le drame de gangsters, mais ce n’est pas nécessaire : elle regorge d’intrigues, de jeux de pouvoir et de performances mémorables pour vous captiver épisode après épisode.
-Herpai Gergely « BadSector »-
MobLand
Direction - 7.2
Acteurs - 7.4
Histoire - 6.2
Visuels/Musique/Sons - 7.4
Ambiance - 7.4
7.1
BON
MobLand ne cherche pas à révolutionner le genre, mais l’atmosphère, le casting et l’écriture sont si efficaces qu’on ne peut s’en détacher. Le retour de Tom Hardy dans l’univers impitoyable de la pègre britannique est un pur régal, et l’équilibre entre menace et style est irrésistible. Grâce à la maîtrise tranquille de Ritchie, cette plongée dans l’underground londonien est un régal – même si vous aurez parfois besoin d’une lampe de poche pour y voir clair.