CRITIQUE DE FILM – Il y a 88 ans, Disney dévoilait Blanche-Neige et les Sept Nains, le tout premier long-métrage d’animation, révolutionnant non seulement le potentiel du studio, mais aussi l’histoire du cinéma en prouvant tout ce que l’animation pouvait accomplir. Après des années à produire des courts-métrages et des Silly Symphonies, Disney a défié toutes les attentes—et ce faisant, a créé un chef-d’œuvre qui conserve encore aujourd’hui toute sa magie.
Bien que Blanche-Neige et les Sept Nains soit un classique incontestable, un triomphe de l’histoire du cinéma et un modèle pour de nombreux films ultérieurs, il n’est pas exempt de défauts. À l’époque, Disney expérimentait encore la transition des courts-métrages de dix minutes vers une narration complète de 83 minutes, et cela se ressent dans le film. L’intrigue proprement dite se déroule en dix minutes au début et à la fin, tandis que l’heure intermédiaire est occupée par des séquences musicales sur le ménage. Blanche-Neige elle-même manque de profondeur (Cendrillon, treize ans plus tard, a été bien mieux développée en tant que personnage à part entière), et il est également vrai que le Prince sans visage et la Reine maléfique restent des figures assez énigmatiques. Blanche-Neige et les Sept Nains est une réalisation monumentale, mais aussi le fruit d’une expérimentation visant à exploiter un tout nouveau mode de narration—et il est compréhensible que l’ensemble ne soit pas toujours totalement abouti. En résumé : Blanche-Neige et les Sept Nains peut être un chef-d’œuvre fondateur d’un genre, tout en présentant certaines faiblesses que Rachel Zegler ne manque pas de souligner à juste titre.
Étant donné l’enthousiasme passé de Disney pour les suites et préquelles sorties directement en DVD, ainsi que ses tentatives récentes de réinterpréter ses classiques animés en prises de vue réelles, il est surprenant qu’il ait fallu près d’un siècle pour revenir à cet univers (bien que ce ne soit pas faute d’avoir essayé). Blanche-Neige, mis en scène par Marc Webb ((500) jours ensemble, The Amazing Spider-Man) et scénarisé par Erin Cressida Wilson (La Secrétaire, Chloe), ne cherche pas à “améliorer” Blanche-Neige et les Sept Nains, mais plutôt à repenser et à approfondir certains éléments qui étaient restés sous-exploités dans le film de 1937. Comme pour quasiment toutes les adaptations en live-action de Disney, cette version ne risque pas d’éclipser l’originale, mais cette nouvelle Blanche-Neige s’inscrit comme une extension de l’univers, un complément intéressant au classique animé.
De quoi parle la nouvelle version de Blanche-Neige ?
Cette nouvelle adaptation en prise de vue réelle se concentre principalement sur l’expansion du personnage de Blanche-Neige (Zegler) et de son royaume. L’histoire suit Blanche-Neige, fille unique d’un roi et d’une reine qui gouvernaient avec amour, gentillesse et compassion. À la mort de la reine, le roi se remarie avec une femme dotée de pouvoirs magiques (Gal Gadot), qui ne tarde pas à s’imposer. Mais lorsque le roi part un jour sans jamais revenir, la nouvelle reine s’empare du pouvoir d’une main de fer : elle méprise son peuple, accapare les richesses du royaume à son profit, tandis que le pays sombre dans la misère et la faim. Beaucoup croient que Blanche-Neige a disparu, mais en réalité, la reine l’a réduite au rang de servante dans son propre château.
Chaque jour, la reine consulte son miroir magique et lui demande qui est la plus belle du royaume. Le miroir lui répond toujours qu’il s’agit d’elle, jusqu’au jour où Blanche-Neige fait preuve de bonté envers Jonathan (Andrew Burnap), un voleur et rebelle local qui s’introduit dans le château. Dès lors, le miroir prononce le nom de Blanche-Neige. Furieuse, la reine ordonne alors à son fidèle Chasseur (Ansu Kabia) de l’emmener en forêt, de la tuer et de lui rapporter son cœur. Mais, touché par la pureté de Blanche-Neige, le Chasseur lui permet de s’enfuir. Elle trouve alors refuge dans une forêt enchantée, où elle rencontre sept nains ainsi qu’un groupe de rebelles qui préparent un soulèvement contre la reine. Blanche-Neige se joint à eux dans l’espoir de restaurer la grandeur passée du royaume.
Moderniser un conte classique – une réussite en grande partie
Cette nouvelle version de Blanche-Neige est particulièrement convaincante lorsqu’elle élargit la perspective du récit. L’approfondissement du passé de Blanche-Neige, son rôle dans le royaume et sa relation avec la Reine maléfique enrichissent considérablement l’histoire. Il ne s’agit plus simplement d’un conte sur la beauté et la jalousie ; c’est désormais une histoire sur un souverain tyrannique et égoïste, confronté à la puissance de l’empathie, de la gentillesse et de l’espoir (un thème universel qui résonne encore aujourd’hui).
Le traitement des nains dans cette adaptation a fait l’objet de nombreux débats, mais le scénario de Wilson parvient à résoudre cette question de manière relativement efficace. Les nains vivent ensemble depuis plus de deux siècles, et le film exploite habilement leurs personnalités opposées (comment Grincheux pourrait-il tolérer le bavardage incessant de Joyeux ?). L’un des meilleurs développements de ce remake est sans doute la manière dont il approfondit la relation entre Simplet et Blanche-Neige. Leur amitié, qui était déjà emblématique dans le film original, est ici sublimée, au point qu’on en oublie presque qu’il s’agit de personnages en images de synthèse.
Cependant, toutes les mises à jour ne sont pas aussi réussies. Les nains ont par exemple acquis une capacité étrange : leurs mains lumineuses leur permettent de détecter les pierres précieuses dans la mine—une idée superflue et sans véritable utilité. De plus, le film sur-explique parfois des éléments qui n’avaient pas besoin de justification supplémentaire. Avions-nous réellement besoin d’une origine pour le nom de Blanche-Neige ? Ou de savoir que le royaume était autrefois réputé pour ses pommes rouges que Blanche-Neige et sa mère utilisaient pour faire des tartes ?
La décision la plus étrange reste cependant l’introduction du groupe de rebelles mené par Jonathan. Il est évident que ces personnages étaient initialement censés remplacer les nains avant que Disney n’opte finalement pour des versions en CGI. Résultat : les deux groupes coexistent dans le film, mais les rebelles sont si sous-exploités qu’ils n’apportent finalement rien et alourdissent inutilement l’intrigue.
Rachel Zegler, une Blanche-Neige convaincante
L’un des atouts majeurs du film réside dans la prestation de Rachel Zegler. Son personnage, façonné par l’éducation de son père, qui lui a inculqué courage, loyauté et sens de la justice, prend vie à travers son interprétation. Elle ne cherche pas à imiter Blanche-Neige telle qu’elle existait en animation, mais insuffle une sensibilité et une profondeur nouvelles au personnage. Elle livre l’une des meilleures performances de princesse Disney en live-action, préservant le charme et l’innocence du personnage tout en lui offrant enfin une véritable initiative.
Blanche-Neige : une relecture respectable pour une nouvelle génération
Sans être parfaite, cette adaptation respecte l’essence du conte tout en l’adaptant avec intelligence aux attentes modernes. Un pari audacieux, qui malgré quelques maladresses, offre une relecture honnête et sincère du classique de Disney.
-Gergely Herpai “BadSector”-
Blanche-Neige
Direction - 6.7
Acteurs - 7.2
Histoire - 6.8
Visuels/Musique/Sons - 7.2
Ambience - 7.4
7.1
BON
La nouvelle adaptation en live-action de Blanche-Neige tente de moderniser le classique avec audace, et y parvient souvent. Rachel Zegler incarne brillamment l’héroïne, bien que la Reine maléfique de Gal Gadot manque de profondeur. Ce n’est pas parfait, mais c’est une relecture honnête et soignée du conte.