CRITIQUE SÉRIE – Ce thriller d’espionnage haletant donne l’impression que Homeland est de retour. Dès qu’il prend son envol, la série Netflix se révèle être un récit intense et nerveux, centré sur un agent infiltré iranien. Missions périlleuses, pièges mortels et un héros dont chaque pas pourrait être le dernier. Un suspense implacable et une action menée tambour battant.
The Night Agent est d’abord apparue comme un outsider. Ni à la mode, ni mise en avant par Netflix, qui ne l’a pas placée en tête de ses recommandations. Et pourtant, grâce à une montée en puissance progressive, elle est devenue l’une des séries les plus visionnées de la plateforme, gagnant même sa place parmi les meilleurs thrillers de 2023 selon la critique. Rien d’étonnant : son rythme effréné et ses intrigues enchevêtrées en font un pur jeu d’espionnage, de ceux dont on ne décroche pas une fois lancés.
L’histoire suit Night Action, une cellule ultra-secrète du renseignement américain, si confidentielle qu’elle n’existe officiellement pas. Lors de la première saison, Peter Sutherland (Gabriel Basso) en était l’agent le plus subalterne, affecté à une tâche unique : répondre à un téléphone sécurisé situé au sous-sol de la Maison-Blanche, un numéro qui ne sonnait que lorsque des agents se retrouvaient en danger. Mais à force de courage, de maîtrise du combat rapproché et – surtout – d’une loyauté sans faille, il a fini par contrecarrer à lui seul un complot visant à assassiner le président.
Nouvelle mission, nouvelle menace
Désormais, les règles changent. Peter est devenu un véritable agent de terrain et Shawn Ryan – créateur du très sombre The Shield – ne peut plus compter sur la même mécanique, jouant sur l’apparente simplicité de la série pour y injecter une tension sous-jacente. Il faut aller plus loin, frapper plus fort.
Ou bien pas tant que cela ? À première vue, cette deuxième saison semble hésiter à prendre de l’ampleur. Dès le premier épisode, Peter passe de Bangkok à New York, traquant des hommes en possession d’une clé USB renfermant des informations confidentielles, prêts à tuer quiconque tenterait de la leur arracher. Quand l’opération tourne au fiasco après une fuite des renseignements de Night Action, Peter disparaît des radars, entre en clandestinité et retrouve sa compagne, Rose (Luciane Buchanan). Civile de profession, elle n’en reste pas moins intrépide, perspicace et d’une intégrité irréprochable – et, comme par un heureux hasard, une programmeuse de génie spécialisée dans la reconnaissance faciale avancée.
Retranchés dans un appartement spartiate loué sous une fausse identité, Peter et Rose entament la surveillance d’un criminel, mais la mission dérape rapidement. L’action se resserre dans les ruelles sombres, avant qu’ils ne se retrouvent pris au piège d’une force bien plus redoutable qu’eux. Le rythme est efficace, mais tant que la série s’appuie sur ses schémas éprouvés, elle risque de s’enfermer dans ses propres limites. The Night Agent reste un thriller austère, assumant pleinement sa retenue : la relation entre Peter et Rose est d’une pudeur surprenante, presque décalée au regard des standards actuels. Pas de légèreté, pas d’humour, et aucune volonté de sortir du cadre strict qu’elle s’est imposé. Pas de nihilisme à la Jason Bourne, pas d’ironie mordante à la Reacher, et encore moins d’élégance à la James Bond, avec ses plaisirs ostentatoires et ses escapades luxueuses. C’est un jeu d’échecs dans l’ombre, où Peter, acculé dans un entrepôt désaffecté et encerclé par des mercenaires, doit trouver en urgence un coup d’avance.
Tout thriller d’espionnage finit par devenir Homeland
Pas d’inquiétude : il y a un plan B. The Night Agent glisse progressivement vers une dynamique à la Homeland. Si la première saison s’intéressait aux trahisons politiques internes aux États-Unis, cette fois, l’intrigue prend une dimension internationale : un criminel de guerre européen, à la Milosević, s’allie secrètement avec la délégation iranienne à l’ONU, tandis qu’une attaque terroriste sur le sol américain se profile. Un scénario qui, en 2025, n’a peut-être plus la même résonance géopolitique, mais The Night Agent n’a jamais cherché à suivre l’air du temps.
Tandis que Peter, Rose et leur unique alliée de confiance, la vétérane du renseignement Catherine (Amanda Warren), tentent de décrypter la valeur des documents volés et les réseaux qui les exploitent, une autre histoire se joue en parallèle. Dans la luxueuse résidence new-yorkaise de l’ambassadeur d’Iran, une taupe est en action. Noor (Arienne Mandi), une jeune assistante de bas rang, est prête à trahir son supérieur au profit de la CIA, espérant en échange l’exfiltration de sa famille hors d’Iran. Mais si elle est découverte, c’est la colère d’un régime paranoïaque, autoritaire et viscéralement misogyne qui s’abattra sur elle.
L’espionnage en accéléré
Il n’y a rien de nouveau à voir un non-initié tenter de jouer au parfait espion sous le nez de figures redoutables, mais The Night Agent sait exploiter cette mécanique pour maintenir la tension à son comble. Un épisode où Peter et Rose s’infiltrent dans une réception diplomatique se révèle diablement efficace, tandis qu’une mission risquée en Iran capture parfaitement l’essence de Homeland, utilisant chaque recoin de son environnement hostile pour maximiser la menace.
Si la dynamique de la série a évolué, son essence reste intacte : un thriller au cordeau, sans fioritures, qui se prend au sérieux sans détour, refusant les intrigues inutiles et les clins d’œil aux spectateurs. À mesure que les cadavres s’accumulent et que Peter se retrouve acculé dans des situations de plus en plus désespérées, une chose devient certaine : cette deuxième saison sait exactement où elle va et comment y parvenir.
– Gergely Herpai “BadSector” –
The Night Agent
Direction - 8.1
Acteurs - 8.2
Histoire - 8.2
Visuels/Musique/Sons/Action - 8.4
Ambiance - 8.5
8.3
EXCELLENT
La saison 2 de The Night Agent revient avec des enjeux décuplés et des séquences d’action plus périlleuses, s’enfonçant toujours plus profondément dans l’univers de l’espionnage international. Si elle peut parfois sembler prisonnière de sa propre mécanique, la tension et les rebondissements restent au rendez-vous. Si la première saison vous a tenu en haleine, celle-ci ne vous laissera pas souffler.