CRITIQUE DE SÉRIE – L’annonce par Prime Video d’une adaptation en live-action de Like a Dragon en six épisodes avait suscité bien des craintes parmi les fans. L’absence des fameuses scènes de karaoké, si emblématiques de la franchise Sega, a renforcé l’impression que les créateurs n’avaient pas saisi l’essence du jeu. Résultat : une mélodrame étiré, confus et sans relief, dont la seule légitimité repose sur le nom Yakuza.
Quand Prime Video a levé le voile sur cette série, les aficionados de la saga culte ont immédiatement douté de la capacité de cette adaptation à retranscrire l’univers unique de Like a Dragon. L’absence annoncée de moments iconiques, comme les scènes de karaoké, a suffi à mettre en question la compréhension des créateurs quant au charme si particulier des jeux. Hélas, ces doutes étaient fondés. L’humour et la légèreté, indispensables pour équilibrer la gravité dramatique des jeux, sont ici absents. Ce Like a Dragon n’est qu’un mélodrame longuet, dépourvu de toute énergie, qui n’aurait jamais attiré l’attention sans la marque Yakuza.
Une gravité trop pesante, sans la folie absurde
Certes, les jeux Yakuza ne manquent pas de mélodrame, mais leur véritable force réside dans l’équilibre entre gravité et absurdité. Le protagoniste Kazuma Kiryu, incarné ici par Ryōma Takeuchi, est un homme droit et rigide qui se retrouve régulièrement plongé dans des situations aussi burlesques qu’improbables. Ce contraste entre un scénario principal sérieux et des éléments hilarants crée une dynamique unique. Malheureusement, cette adaptation semble ignorer cet aspect essentiel.
La série adopte une narration non linéaire, alternant entre deux périodes, et suit l’histoire de Kiryu et de ses amis – Nishikiyama, Yumi, Miho et Aiko. Partant d’un orphelinat, le groupe se retrouve rapidement mêlé à un réseau clandestin de paris sur des combats illégaux, orchestré par la pègre. Dix ans plus tard, ils doivent affronter les conséquences de leurs choix. Mais les événements paraissent souvent inachevés, les intrigues abandonnées en cours de route. L’ensemble manque de cohérence, donnant l’impression de survoler un récit sans profondeur.
Inspirée librement des jeux Yakuza 0 et Yakuza, la série prend de nombreuses libertés et simplifie à outrance. Le scénario originel se réduit à une banale quête de vengeance, avec un dénouement tout aussi insatisfaisant que son introduction. En transposant les événements de Yakuza 0 de 1988 à 1995, la série perd également une critique satirique essentielle sur l’absurdité de la bulle immobilière de Tokyo. Une décision étrange, d’autant plus que la période choisie était marquée par une profonde crise économique au Japon, en complet décalage avec l’abondance affichée dans le récit.
Une esthétique réussie, mais un univers sans âme
Cela dit, tout n’est pas à jeter. La reconstitution détaillée de Kamurochō est impressionnante. Les meilleurs moments de la série résident dans son souci du détail, avec des clins d’œil culturels précis, comme les affiches de films fidèles à l’époque, évoquant par exemple le succès de Forrest Gump lors de sa sortie japonaise en 1995. Les scènes finales, avec une pléthore de figurants, apportent une certaine vitalité à l’univers. Mais cette richesse visuelle ne parvient pas à masquer le manque d’âme de l’ensemble.
Kento Kaku brille dans le rôle de Nishikiyama, en particulier dans les séquences de 2005, où son regard perçant et impénétrable lui confère une aura inquiétante. Dans les flashbacks de 1995, il dévoile une facette différente de son personnage, montrant une réelle maîtrise de son jeu, même si les événements qui l’entourent manquent de consistance. Munetaka Aoki, parfait dans le rôle de Majima, souffre d’un cruel manque de temps à l’écran. Sa présence, sporadique au début, reste sous-exploitée jusque dans le final. Les fans seront ravis d’entendre au moins une fois son célèbre « Kiryu-chan ! », mais cette réplique culte, prononcée hors champ, souligne à quel point Majima est relégué au second plan.
Une adaptation sans saveur pour les fans de Yakuza
Malgré ses qualités sporadiques, cette adaptation peine à justifier son existence. Like a Dragon: Yakuza donne l’impression d’être un contenu destiné à être regardé distraitement, sans grande attention. Pour ceux qui ne parlent pas couramment japonais et doivent lire les sous-titres, l’expérience devient rapidement lassante.
Sans le nom Like a Dragon, cette série passerait totalement inaperçue. Elle manque cruellement de l’esprit et de l’ambiance propres aux jeux, ne s’inspirant que superficiellement de son matériau d’origine. Bien que certaines performances, notamment celle de Kento Kaku, soient remarquables, elles ne suffisent pas à compenser un scénario fade et décousu. Les fans méritent bien mieux que ce produit sans passion.
-Herpai Gergely « BadSector »-
Like a Dragon: Yakuza
Direction - 3.8
Acteurs - 4.2
Histoire - 3.2
Visuels/Musique/Sons - 5.1
Ambiance - 3.1
3.9
MAUVAIS
Like a Dragon: Yakuza est une adaptation visuellement soignée, mais dépourvue de la folie et de l’humour qui font le charme des jeux. Malgré des interprétations parfois solides, le récit manque de cohésion et laisse de côté les personnages emblématiques. Cette tentative échoue à capturer l’esprit de la franchise Sega, et les fans devront attendre une version plus fidèle et inspirée.