Au cœur de l’océan – La baleine n’est pas le vrai monstre

CINÉMA – Hiver 1820. Le baleinier Essex quitte la Nouvelle-Angleterre et met le cap sur le Pacifique. Il est alors attaqué par une baleine colossale qui provoque le naufrage de l’embarcation. À bord, le capitaine George Pollard, inexpérimenté, et son second beaucoup plus entraîné, Owen Chase, tentent de maîtriser la situation. Mais face aux éléments déchaînés et aussi à la faim, les hommes se laissent conquérir par la panique et le désespoir… Le réalisateur américain à succès Ron Howard s’est penché, dans son dernier film “Au cœur de l’océan”, sur l’histoire vraie qui a inspiré le roman “Moby Dick”, une aventure humaine au moins autant qu’une chasse à la baleine.

 

Une histoire d’un capitaine fou de revanche contre un insaisissable cachalot tueur d’hommes : “Moby Dick“, le roman d’Herman Melville, publié en 1851, est devenu un classique de la littérature américaine et a fait le tour du monde. Comme beaucoup d’Américains, Ron Howard avait lu le livre à l’école mais ne savait pas que le récit était inspiré d’une histoire vraie, narrée par Nathaniel Philbrick dans le livre “La véritable histoire de Moby Dick“, sorti en 2000.

Un vieux script

C’est l’acteur australien Chris Hemsworth, connu pour son rôle de “Thor” au cinéma, qui lui a signalé qu’un script tiré de l’ouvrage végétait à Hollywood depuis plus de dix ans. “Je pense que la technologie permettant de recréer le cachalot n’était pas encore disponible jusqu’ici”, se souvient Ron Howard lors d’une rencontre avec la presse à New York. “J’ai rencontré d’autres réalisateurs et leur problème était toujours le même : ils ne savaient pas comment rendre le cachalot réaliste”, abonde Charles Leavitt, auteur du scénario original, dont l’essentiel a été repris par Ron Howard.

Mais en ouvrant le champ des possibles grâce aux effets spéciaux, le réalisateur d’”Un homme d’exception” et “Apollo 13” a su garder la technologie sous contrôle, pour qu’elle ne devienne pas le caractère principal de son film.

La naissance d’une œuvre

Car “Au cœur de l’océan” est d’abord une histoire d’hommes, de relations sociales, intimes, sur l’océan, mais aussi sur terre. En toile de fond, la rencontre entre Herman Melville et Thomas Nickerson, ancien mousse sur l’Essex, navire coulé en 1820 par un cachalot. Le premier veut construire le roman qui le consacrera sur le récit du second, qui n’a jamais voulu se livrer jusqu’ici, car prisonnier d’un lourd secret.

Le film peint aussi le tableau d’une société, celle de Nantucket (nord-est des Etats-Unis), capitale mondiale de l’industrie baleinière au début du XIXe siècle. Une industrie dirigée par quelques grandes familles, dont est issu George Pollard, le capitaine de l’Essex.

La cohabitation entre ce jeune homme bien né et son second, Owen Chase, fils de fermier mais marin beaucoup plus expérimenté, est l’élément central du récit. “C’était plaisant de jouer avec les subtilités de leur relation”, se souvient Chris Hemsworth, qui incarne Owen Chase, personnage qui a réellement existé.

A la faveur d’un destin tragique, un respect mutuel s’installera finalement entre les deux hommes que tout opposait. Pour rendre les scènes de mer plus réalistes, le réalisateur américain a beaucoup tourné sur l’eau et fait suivre également à ses acteurs un régime amaigrissant. Une cure qui les a rapprochés, selon Chris Hemsworth. “On a vraiment formé un groupe, je ne m’attendais pas à ça. Ça m’a rappelé quand je jouais au football (australien), plus jeune”, explique l’acteur australien.

Le cachalot est secondaire

Le cachalot au second plan, Ron Howard s’éloigne régulièrement des canons du film d’action pour livrer au spectateur une sorte de huis clos oppressant : des hommes, perdus au milieu de l’océan, avec pour seule ambition de survivre.

Le réalisateur fait ainsi de son 23e long métrage un objet plus ambitieux qu’un film catastrophe à grand spectacle. Jusqu’au traitement du cachalot même, parabole du rapport de l’homme à la nature, tout à fait dans l’air du temps, et pas seulement machine à tuer.

Pour Ron Howard, l’univers tient davantage de “King Kong” que des “Dents de la mer”, celui d’un animal “provoqué par l’homme”, dit-il. “Cette histoire était presque trop belle pour être vraie”, résume Nathaniel Philbrick, l’auteur du livre “Au cœur de l’océan”.

Réaliste

« Au Coeur de l’Océan » est d’un réalisme à couper le souffle. C’est à la fois un film d’aventures nautiques avec un souffle épique et un survival– et plus précisément un film de survie après un naufrage… Les décors sont magnifiques, la reconstitution de la vie sur terre et sur mer au XIXe siècle est parfaite.

Quant aux scènes de naufrage et aux rencontres avec le fameux cachalot blanc, elles sont vraiment impressionnantes. J’ai pensé à deux films qui sont un peu similaires : « L’Odyssée de Pi « et « All is Lost » pour la partie naufrage… Mais « L’Odyssée de Pi » possède un côté imaginaire, et « All is Lost » était réalisé de façon quasi-expérimentale (un seule acteur, aucune parole…).

Howard a une façon plus classique de filmer, et vise l’efficacité, l’émotion et le spectaculaire. Il s’autorise tout de même quelques plans assez stylisés -en plongée par exemple, mais aussi des gros plans etc.
On peut voir quelques similitudes avec « Master et Commander », notamment pour la représentation de l’organisation sociale des marins.

Je ne suis pas experte en navigation, mais j’ai l’impression que Ron Howard a cherché à être le plus exact possible dans sa reconstitution du baleinier, et sa description du travail des marins, du capitaine au mousse. La hiérarchie et les tensions qui en résultent, ainsi que les horribles choix que doivent faire les rescapés sont bien montrés – mais sans trop en faire dans le pathos.

Acteurs presque sans faille

« Au Coeur de l’Océan » est soutenu par une interprétation de bonne qualité. Ben Whishaw (dans le rôle de l’auteur de Moby Dick, Herman Melville) et Brendan Gleeson arrivent à nous intéresser et nous émouvoir alors que techniquement ils ne font que se raconter une histoire en buvant des coups !

C’est la seconde collaboration de Chris Hemsworth avec Ron Howard après « Rush ». Et force est de constater que le réalisateur sait tirer le meilleur de cet acteur… Hemsworth nous prouve qu’il peut jouer autre chose que les dieux nordiques. Il est très bon dans le rôle du héros – un vrai de vrai.

L’acteur a subi une transformation physique importante pour jouer les naufragés, et je l’ai trouvé très crédible dans ce rôle de marin mal né qui cherche à s’élever dans la société. Comme dans Rush, il y a une histoire de rivalité. Cette fois le personnage de Chris Hemsworth s’oppose à celui du capitaine, joué par Benjamin Walker.

Et puis il y a des gueules de cinéma comme Cillian Murphy, et les moins connus Joseph Mawle qu’on a pu voir dans Kill your friends) ou les jeunes Tom Holland et Frank Dillane (Voldemort ado dans Harry Potter !) qui ont tous des seconds rôles marquants.

Précisons que les maquilleurs ont fait un excellent travail, les acteurs apparaissent tous amaigris, déshydratés et blessés. On est loin des Pirates des Caraïbes, des films de flibustiers, ou de « Cyclone à la Jamaïque ». Le maître mot est bien réalisme… Le Big Fish, ce cachalot blanc albinos nous paraît également bien réel.

Au final, je suis sortie du cinéma un peu choqué devant les souffrances des personnages. J’ai bien aimé voir la genèse de Moby Dick (la réflexion sur la création d’une œuvre littéraire, où commence la fiction, où est la part de vérité).

A noter que le film met en images le texte « Au Coeur de l’Océan » (In the Heart of the Sea) signé par Nathaniel Philbrick.
La reconstitution du XIX ème siècle aux USA, et l’ouverture sur le futur avec l’arrivée du pétrole sont également bien traitées. Ron Howard livre un film spectaculaire en nous contant une terrible catastrophe maritime.

-BadSector-

Au cœur de l'océan

ACTEURS - 8.1
METTEUR EN SCÈNE - 7.8
HISTOIRE - 7.4
EFFETS VISUELS - 8.1
AMBIANCE - 7.9

7.9

BON

La reconstitution du XIX ème siècle aux USA, et l’ouverture sur le futur avec l’arrivée du pétrole sont également bien traitées. Ron Howard livre un film spectaculaire en nous contant une terrible catastrophe maritime.

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BadSector is a seasoned journalist for more than twenty years. He communicates in English, Hungarian and French. He worked for several gaming magazines - including the Hungarian GameStar, where he worked 8 years as editor. (For our office address, email and phone number check out our impressum)

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