{"id":98468,"date":"2024-12-17T17:40:51","date_gmt":"2024-12-17T16:40:51","guid":{"rendered":"https:\/\/thegeek.site\/?p=98468"},"modified":"2024-12-17T17:42:43","modified_gmt":"2024-12-17T16:42:43","slug":"better-man-une-biographie-musicale-qui-pousse-le-concept-jusquau-delire","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/thegeek.site\/2024\/12\/17\/better-man-une-biographie-musicale-qui-pousse-le-concept-jusquau-delire\/","title":{"rendered":"Better Man \u2013 Une biographie musicale qui pousse le concept jusqu\u2019au d\u00e9lire"},"content":{"rendered":"

CRITIQUE DE FILM – Comment dynamiser une \u00e9ni\u00e8me biographie musicale narcissique ? Avec des singes. Je suis tout \u00e0 fait s\u00e9rieux. Better Man<\/em> est n\u00e9 d\u2019une conversation entre l\u2019ic\u00f4ne de la pop britannique Robbie Williams et le r\u00e9alisateur Michael Gracey.<\/h4>\n

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Williams a confi\u00e9 qu\u2019au fil de sa carri\u00e8re, il s\u2019\u00e9tait souvent senti comme un \u00ab singe dansant \u00bb, une id\u00e9e que Gracey a transform\u00e9e en un concept visuel saisissant. Plut\u00f4t que de faire rejouer les performances iconiques de Williams par un acteur, le chanteur pr\u00eate sa voix \u00e0 une version anim\u00e9e et num\u00e9ris\u00e9e de lui-m\u00eame sous forme de singe. Le pari semble insens\u00e9, mais, contre toute attente, il fonctionne. Le r\u00e9sultat insuffle une fra\u00eecheur bienvenue \u00e0 un genre souvent enlis\u00e9 dans ses histoires pr\u00e9visibles de drogues, de c\u00e9l\u00e9brit\u00e9 et de r\u00e9demption.<\/p>\n

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\u00ab Moi je joue, moi je danse, comme un singe \u00bb \u2013 Brigitte Bardot, Moi je joue (1964)<\/em><\/h3>\n

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Jonno Davies pr\u00eate son talent au motion-capture pour incarner Robbie Williams en chimpanz\u00e9, que l\u2019on d\u00e9couvre dans ses plus jeunes ann\u00e9es sous les traits d\u2019un adorable enfant sauvage. Autour de lui, tout le monde reste humain : son p\u00e8re Peter (Steve Pemberton), un homme n\u00e9gligent, fanatique de Sinatra et \u00e9ternel fuyard ; sa m\u00e8re Janet (Kate Mulvany), d\u00e9vou\u00e9e mais rel\u00e9gu\u00e9e \u00e0 l\u2019arri\u00e8re-plan ; et sa grand-m\u00e8re Betty (Alison Steadman), le c\u0153ur \u00e9motionnel du film. Better Man<\/strong><\/em> retrace l\u2019ascension fulgurante de Williams : de l\u2019enfant ch\u00e9tif toujours choisi en dernier dans les \u00e9quipes de sport \u00e0 ses concerts l\u00e9gendaires \u00e0 Knebworth, peu avant son internement en cure de d\u00e9sintoxication. On assiste \u00e0 sa trajectoire chaotique, de la c\u00e9l\u00e9brit\u00e9 soudaine avec le boys band Take That<\/strong><\/em> jusqu\u2019\u00e0 son explosion en solo, \u00e0 travers une s\u00e9rie d\u2019\u00e9v\u00e9nements qui ont solidifi\u00e9 son statut de l\u00e9gende de la pop \u2014 pour le meilleur ou pour le pire.<\/p>\n

Je l\u2019avoue, j\u2019ai toujours eu un faible pour les biopics musicaux, surtout lorsqu\u2019un singe num\u00e9rique dop\u00e9 \u00e0 la coca\u00efne en est la vedette. Cela dit, Robbie Williams n\u2019a jamais figur\u00e9 dans mes playlists Spotify. Heureusement, Better Man<\/strong><\/em> ne requiert aucune adoration aveugle du r\u00e9pertoire ou de la vie de Williams. Gr\u00e2ce aux talents de mise en sc\u00e8ne de Gracey \u2014 d\u00e9j\u00e0 remarqu\u00e9s dans The Greatest Showman<\/strong><\/em> \u2014, chaque morceau de Williams r\u00e9sonne avec une intensit\u00e9 particuli\u00e8re, parfaitement int\u00e9gr\u00e9 aux \u00e9tapes cruciales de sa carri\u00e8re. En mariant somptuosit\u00e9 visuelle et \u00e9motion brute, Gracey sublime les chansons r\u00e9enregistr\u00e9es pour le film, ajoutant une dimension \u00e0 la fois spectaculaire et poignante.<\/p>\n

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Une id\u00e9e folle, mais parfaitement ma\u00eetris\u00e9e<\/h3>\n

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De prime abord, l\u2019id\u00e9e d\u2019un Better Man<\/strong><\/em> centr\u00e9 sur un chanteur-singe semble absurde, une simple attraction de cirque. Mais la vision de Gracey reste remarquablement \u00e9quilibr\u00e9e et jamais surr\u00e9aliste. L\u2019estime de soi fragile de Williams, fond\u00e9e sur son succ\u00e8s aupr\u00e8s des fans et le nombre de billets vendus, est illustr\u00e9e avec une \u00e9vidence tellement pouss\u00e9e qu\u2019elle en devient brillante. Les mouvements capt\u00e9s de Jonno Davies rivalisent avec ceux des meilleurs La Plan\u00e8te des singes<\/strong><\/em>, tandis que la voix de Williams ancre son alter ego dans une troublante r\u00e9alit\u00e9. L\u2019animation, d\u2019un r\u00e9alisme saisissant, s\u2019int\u00e8gre si naturellement \u00e0 l\u2019univers du film que les personnages ne sourcillent m\u00eame pas face \u00e0 l\u2019absurdit\u00e9, et nous non plus. Ce tour de force ne faiblit jamais, une r\u00e9ussite en soi tant il repose sur un \u00e9quilibre pr\u00e9caire entre le grotesque et la cr\u00e9dibilit\u00e9.<\/p>\n

Cet alter ego simiesque apporte un souffle nouveau aux th\u00e8mes classiques des r\u00e9cits \u00ab Behind the Music<\/strong><\/em> \u00bb. Les luttes de Williams contre l\u2019alcoolisme, la toxicomanie et la d\u00e9pression restent profond\u00e9ment bouleversantes, mais Gracey les r\u00e9invente avec une ing\u00e9niosit\u00e9 visuelle qui marque les esprits. Dans des s\u00e9quences hallucin\u00e9es, Williams fait face \u00e0 ses doubles pass\u00e9s \u2014 eux aussi sous forme de singes \u2014, qui l\u2019observent avec m\u00e9pris. Une sc\u00e8ne culmine dans un champ de bataille cauchemardesque o\u00f9 l\u2019ar\u00e8ne enti\u00e8re se transforme en une arm\u00e9e de clones guerriers de lui-m\u00eame. Ce tableau, digne d\u2019un blockbuster de La Plan\u00e8te des singes<\/strong><\/em>, r\u00e9invente l\u2019expression cin\u00e9matographique des traumas personnels. Les personnages combattant leurs d\u00e9mons int\u00e9rieurs ne sont pas nouveaux, mais combien doivent affronter leurs doubles simiesques en gladiateurs ?<\/p>\n

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Les limites du biopic musical<\/h3>\n

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Malgr\u00e9 son originalit\u00e9 audacieuse, Better Man<\/strong><\/em> ne parvient pas \u00e0 se d\u00e9faire totalement des poncifs du biopic musical. L\u2019arc narratif rappelle celui de Rocketman<\/strong><\/em> ou de Bohemian Rhapsody<\/strong><\/em> : un artiste br\u00fble ses ponts, flirte avec la destruction, puis atteint un moment de gr\u00e2ce sc\u00e9nique qui change tout.<\/p>\n

Les addictions pr\u00e9coces de Williams et son adolescence dans un boys band ne sont pas des th\u00e8mes in\u00e9dits, et la satire mordante de Walk Hard: The Dewey Cox Story<\/strong><\/em> plane en arri\u00e8re-plan, rappelant \u00e0 quel point ce type de r\u00e9cit peut sombrer dans le convenu. M\u00eame si le sc\u00e9nario \u2014 co\u00e9crit par Oliver Cole et Simon Gleeson \u2014 contient des fulgurances cr\u00e9atives, il retombe parfois dans une certaine pr\u00e9visibilit\u00e9.<\/p>\n

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